La musique pour adoucir le séjour des patients hospitalisés aux soins intensifs
Une étude sherbrookoise audacieuse et inusitée vient d’identifier un lien entre musique et médecine. Le professeur Olivier Lesur et son équipe ont découvert que les patients intubés et ventilés mécaniquement hospitalisés à l’unité des soins intensifs auraient besoin de moins de médicaments et ressentiraient une diminution significative de leur niveau de stress à l’écoute de musique classique. Les conditions de calme reproduites dans cette étude, grâce à la musique à lent tempo, pourraient avoir des retombées cliniques et biologiques importantes sur le devenir de ces personnes en danger de mort.
Ce projet innovateur de recherche clinique, intitulé Projet Musique, présente plusieurs caractéristiques d’intérêt relativement aux soins prodigués aux patients dont l’état est critique. Cette recherche permettrait aussi d’utiliser des méthodes alternatives pouvant soulager les personnes intubées et ventilées mécaniquement, alors qu’elles sont des plus vulnérables. L’investigation a démontré que l’écoute quotidienne d’une musique douce, avec un rythme lent se rapprochant du rythme cardiaque du patient, pourrait réduire la consommation de médicaments analgésiques et de calmants. Même si les signes vitaux n'ont pas systématiquement changé chez les participants de cette étude, leur consommation de médicaments tendait à diminuer. Ainsi, le confort du patient semblait augmenter même s’il ressentait moins le besoin de recevoir une médication, particulièrement la sédation.
La musique : un médicament?
L’étude clinique Projet Musique a été réalisée en fonction du fait que 50 % à 75 % des patients accueillis aux soins intensifs sont intubés pour une durée de plusieurs jours. Dans 90 % de ces cas, les patients reçoivent une médication pour réduire leur anxiété et leur douleur, leur assurant ainsi un meilleur confort. Comme l’unité des soins intensifs est un milieu agressant pour le patient en raison de la luminosité, du bruit et de la constance des soins médicaux, le professeur Olivier Lesur voulait trouver un moyen alternatif ou complémentaire afin de diminuer le stress et augmenter le bien-être des patients. Il y est parvenu par la musique.
Le Projet Musique constitue une étude des plus avant-gardistes. « Je suis très heureux, à titre de médecin, de chercheur et de professeur, d’avoir trouvé avec mes collègues une alternative à la gestion du stress par le biais d’une méthode efficace et peu dispendieuse, et qui donne des résultats des plus intéressants », souligne le Dr Lesur. L’originalité de la recherche provient du fait qu’elle relie les impacts biologiques au stress du patient. Le fait d’écouter une musique apaisante a pu réduire les effets du syndrome de délirium que peut entraîner un séjour aux soins intensifs.
C’est par l’entremise et les recommandations de Louise Drouin, titulaire d’un baccalauréat en musique de l’Université de Sherbrooke, que 55 patients ont pu écouter, à l’aide d’un lecteur MP3, une bande musicale d’une durée d’une heure comprenant 10 pièces de musique classique, et ce, deux fois par jour lors de leur séjour aux soins intensifs.
À propos des chercheurs
Olivier Lesur, M.D., est professeur à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke, médecin intensiviste au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS) et chercheur au Centre de recherche clinique Étienne-Le Bel (CRCELB) du CHUS. C’est avec la participation de Nicole Gallo-Payet, spécialiste des impacts causés par le stress, également professeure à la FMSS et chercheuse au Centre de recherche clinique Étienne-Le Bel du CHUS, que le volet du stress a été étudié. Les résultats du Projet Musique, réalisé en collaboration avec les Dres Geneviève Beaulieu-Boire et Solange Bourque, viennent d’être publiés dans la revue scientifique Journal of Critical Care, un organe officiel de la World Federation of Societies of Intensive and Critical Care Medicine.