Visite de la conseillère scientifique en chef du Canada
Les femmes, des actrices majeures en sciences
Si l’expression « femme scientifique » évoquait jadis un concept utopique à mille lieues de la réalité, elle fait aujourd’hui état d’un progrès bien réel, mais dont l’ampleur se mesure une petite victoire à la fois. C’est le constat que fait la conseillère scientifique en chef du Canada, Mona Nemer, qui était de passage à l’UdeS en avril.
Mona Nemer est une figure importante dans le monde scientifique. Elle est, entre autres, reconnue pour ses travaux d’avant-garde et ses découvertes majeures portant sur les maladies cardiaques.
Depuis 2017, c’est elle qui occupe le poste de conseillère scientifique en chef du Canada. Son mandat consiste à conseiller le gouvernement fédéral sur les enjeux scientifiques d’importance nationale. Mme Nemer veille aussi à rebâtir les ponts entre les scientifiques et le gouvernement et à s’assurer que les futures politiques publiques seront fondées sur les données probantes.
Le défi des femmes en sciences
Lors d’une visite de Mme Nemer au Campus principal en avril, l’Université de Sherbrooke a profité du moment pour s’entretenir avec elle sur la question de la sous-représentation des femmes en sciences, une question qui interpelle particulièrement l'institution.
Je crois qu’il y a une prise de conscience de l’importance de la diversité dans la science et de l’inclusion des femmes comme des participantes, des actrices majeures dans la science.
Mona Nemer, conseillère scientifique en chef du Canada
Selon la scientifique en chef, même si la science au féminin a fait des progrès, il nous reste beaucoup de pain sur la planche : « 50 % de la population ne peut pas être continuellement sous-représentée dans n’importe quel domaine, ce n’est pas normal. »
À son avis, le chemin qu’empruntent les femmes scientifiques au cours de leur parcours professionnel est, encore aujourd’hui, jalonné d’obstacles :
« Les obstacles sont différents selon les domaines, explique Mme Nemer. Par exemple, du côté du génie et des sciences informatiques, l'enjeu est d’avoir des femmes qui veulent aller dans ces domaines-là. Alors il faut se poser la question : quelle est l’image qu’on projette de ces domaines-là? Il y a un problème de rétention dans certains de ces domaines. »
« Dans d’autres domaines comme la biologie ou les sciences de la vie, poursuit-elle, il y a suffisamment de femmes aux études qui font des doctorats, mais on dirait que l’embauche de professeures se fait plus lente. Est-ce que les femmes pensent qu’elles ne peuvent pas vraiment faire une contribution importante tout en ayant une balance dans leur vie privée, les enfants, la famille, etc.? »
Comme le rappelle la scientifique en chef, la question de l’équité, de la diversité et de l’inclusion, c’est l’affaire de tous :
Je crois que la question des femmes en sciences et la question des femmes dans les universités devraient être une préoccupation majeure, à la fois des administrations universitaires, mais également de la société.
Une scientifique accomplie
Mona Nemer s’impose comme un modèle dans la communauté scientifique, en particulier auprès des femmes. Son parcours est par ailleurs fort inspirant.
C’est dans son Liban natal que la jeune Mona décide de faire de la science sa vie. Elle n’a que 13 ans. Avec ses consœurs, elle milite pour obtenir un programme scientifique accessible aux filles. Or à 17 ans, la guerre l’amène à fuir le pays pour terminer ses études universitaires au Kansas, aux États-Unis. Le choc culturel est brutal, d’autant plus que la jeune Libanaise a laissé sa famille derrière elle.
Son mal du pays s’atténue lors d’une courte visite à Montréal entre deux sessions d’études : Mona a le coup de foudre pour la métropole, ses rues, sa langue française… Elle s’y installe et s’inscrit au troisième cycle à l’Université McGill. Elle obtient son doctorat en chimie bio-organique en 1982.
Son sujet de thèse porte sur la synthèse chimique de l’ADN, un sujet avant-gardiste pour l’époque. Les percées qu’elle réalise l’amènent à consacrer sa carrière à la recherche. Dans sa pratique de biochimiste, la chercheuse fait des découvertes importantes pour la prévention de la mortalité infantile liée aux malformations cardiaques.
En 2006, Mme Nemer devient vice-rectrice à la recherche à l’Université d’Ottawa, tout en poursuivant ses recherches en cardiologie. En 2015, elle et son équipe font la découverte d’un nouveau gène lié à l’hypertension.
Après plus de dix ans à titre de vice-rectrice, Mme Nemer est nommée conseillère scientifique en chef du Canada à l’automne 2017. Il s’agit d’un rôle de premier plan dans l’appui au travail vital que font les scientifiques d’ici.
De passage à l'UdeS le 30 avril dernier
C’est à l’occasion de la Célébration de la recherche et des études supérieures 2019 que l’Université a reçu la scientifique en chef sur son Campus principal le 30 avril dernier. Cette dernière a chaleureusement accepté d’agir comme présidente d’honneur lors de la soirée.
Durant les heures qui ont précédé la célébration, la biochimiste a profité de son passage pour rencontrer des chercheurs de l’Institut quantique et pour en apprendre davantage sur l'expertise unique développée dans nos laboratoires.
Mme Nemer a aussi animé un forum en compagnie d’étudiantes et d’étudiants des cycles supérieurs. Les échanges ont porté sur le futur de la science au Canada.