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Une étude pour serrer la vis à des polluants nocifs
Les SPFA, présents dans plusieurs produits de consommation, sont hautement persistants dans l’environnement. Bien classer ces polluants pour mieux les réglementer, c’est ce que souhaitent la professeure Céline Guéguen et le professeur Armand Soldera avec une équipe du Département de chimie et des membres de l’Institut quantique.
Leur expérience en identification et chimie moléculaire, en spectroscopie moléculaire et en approche par apprentissage machine seront mises à profit dans ce nouveau projet visant à faire avancer la recherche sur l’identification de certains polluants dans l’environnement. Les avancements qu’ils espèrent accomplir se placent dans une initiative globale de protection de l’écosystème et de la santé humaine.
Une collaboration essentielle
Le projet de recherche relève d’un partenariat entre l’Université de Sherbrooke, le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, la Ville de Sherbrooke et la Coalition des citoyens et organismes engagés pour la sécurité ferroviaire de Lac-Mégantic.
« Nous bénéficions de l’appui de l’AlgoLab de l’Institut quantique, qui nous aide à explorer les possibilités des sciences quantiques pour résoudre ce genre de problème de classification, explique la Pre Guéguen. L’équipe de l’AlgoLab déploie son savoir-faire technique alliant chimie, quantique et informatique. »
Des polluants éternels
Les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, plus souvent appelées SPFA, se retrouvent dans de nombreux produits de consommation, comme les cosmétiques, les textiles, les écrans solaires, les pesticides, etc. Fabriquées par l’humain, les SPFA font partie d’une classe chimique complexe regroupant plusieurs milliers de composés organiques fluorés. Du fait de leur stabilité thermique et chimique, les SPFA résistent fortement à la dégradation. Les mêmes caractéristiques qui rendent ces substances si désirables dans la conception de produits amènent donc aussi leur lot de complications.
Les SPFA (ou PFAS en anglais) sont exploitées depuis les années 1940, et font déjà l’objet d’interdictions ou de restrictions sévères d’utilisation à l’échelle mondiale.
Une fois créées, les SPFA sont difficiles à éliminer. Elles demeurent persistantes dans l’environnement. Plus encore, l’usage important de ces substances dans les produits industriels et de consommation en entraine une quantité considérable dans la nature. Nous sommes de ce fait exposés aux SPFA présents notamment dans l’eau potable, dans notre alimentation et par le contact avec des sols contaminés. En 2021, de faibles traces de SPFA ont été détectées dans le lac Memphrémagog.
Des restrictions complexes
Le gouvernement canadien a déjà mis en place une réglementation visant l’utilisation des SPFA.
« On cherche notamment à limiter leur introduction dans l’environnement en réduisant leur usage, ce qui n’est pas chose facile étant donné que les SPFA se retrouvent dans plusieurs produits essentiels, précise la Pre Guéguen. On estime qu’il existe présentement au minimum 4 700 SPFA, et l’humain continue d’en développer. »
Outre le fait qu’elles soient omniprésentes, ces substances possèdent une complexité chimique qui les rend difficiles à détecter et à classer, ajoutant un défi supplémentaire. Réglementer ces substances n’est donc pas chose simple; il faut d’abord être en mesure de les identifier et de les classer correctement. Ainsi, c’est à cette problématique que le projet de la Pre Guéguen et du Pr Soldera souhaite remédier.
Chercher à prédire avec précision
Pour les enjeux liés aux SPFA, plusieurs avenues intéressantes sont déjà en cours d’exploration. Parmi les plus prometteuses, on retrouve l’usage de la spectrométrie de mobilité ionique pour obtenir les propriétés structurelles uniques d’une molécule ionisée (« section efficace de collision » ou collision cross section (CCS)). Les CCS permettent ensuite de confirmer l’identification du composé. Lorsqu’il est question des SPFA, c’est la prédiction de ces CCS qui intéresse maintes équipes de recherche internationales, dont celle de ce projet.
La Pre Guéguen et le Pr Soldera espèrent ouvrir la voie pour que les sciences quantiques deviennent un outil permettant la prédiction de contaminants persistants dans l’environnement et, de ce fait, améliorent la détection des SPFA. Le but est de développer un processus hybride d’apprentissage machine classique et quantique permettant de détecter et de prédire la valeur CCS des polluants toxiques.
« Pour ce faire, nous prévoyons utiliser de multiples méthodes d’apprentissage machine classique supervisé, souligne le Pr Soldera. Elles permettront d’évaluer l’efficacité de ces méthodes pour la prédiction de CCS de SPFA. »
Par la suite, ils feront la transition vers des techniques d’apprentissage machine quantique afin d’en comparer le potentiel pour accélérer et améliorer la fiabilité des prédictions.
« Les partenariats et les collaborations sont au cœur de ce projet, explique le Pr Soldera, d’abord d’un point de vue d’expertises où se rencontrent la chimie, la quantique et l’informatique, mais également d’un point de vue des milieux. »
En effet, les organismes, les gouvernements et l’Université de Sherbrooke s’unissent dans le cadre de ce projet visant à protéger les écosystèmes et la santé, chacun jouant un rôle clé dans la démarche.
Liens complémentaires :
Consultez la page professionnelle de Céline Guéguen : https://www.usherbrooke.ca/recherche/fr/specialistes/details/celine.gueguen
Consultez la page professionnelle d’ Armand Soldera : https://www.usherbrooke.ca/recherche/fr/specialistes/details/armand.soldera