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Liaison, 13 janvier 2005
De futurs ingénieurs chimistes spécialistes du
développement durable
STÉPHANIE RAYMOND
Mettre l'ingénierie au service de l'environnement, voilà ce qui s'appelle
du génie. Quatre équipes de futurs ingénieurs chimistes ont conçu des
projets qui pourraient, si des investisseurs ou des MRC s'y intéressaient,
réduire avantageusement la quantité de déchets qui s'acheminent vers nos
dépotoirs.
Les projets ont été réalisés dans le cadre d'un cours de huit mois,
Design de procédés chimiques, offert durant les deux dernières sessions du
bac en génie chimique et visant l'intégration des connaissances. Le thème,
qui change tous les ans, était cette fois le recyclage, ou gestion des
matières résiduelles, sujet très à la mode alors que l'expression
“développement durable” semble enfin vouloir dépasser le stade de concept au
Québec.
La cinquantaine d'étudiants impliqués ont évalué tous les paramètres
entrant en ligne de compte dans le design de procédés chimiques en gestion
des matières résiduelles : avancement technologique, cadre légal, impact
envi-ronnemental, emplacements possibles, sécurité d'opération, faisabilité
technico-économique en fonction des fluctuations de plusieurs paramètres,
génération d'emplois, etc. Le résultat : quatre projets à l'étape de
l'ingénierie préliminaire finalisée prêts à être mis à exécution.
Tri des déchets : récupération ou gazéification
Dans ce projet, l'un des plus innovateurs, les futurs
ingénieurs ont conçu une usine virtuelle qui fait un tri automatique entre
déchets récupérables et non récu-pérables. Ces derniers sont gazéifiés pour
être éliminés, et le gaz de synthèse ainsi produit peut alimenter une
turbine ou un moteur producteur d'électricité. «Il n'existe nulle part au
monde une industrie alliant tri et gazéification des déchets, affirme
Nicolas Abatzoglou, professeur et coordonnateur du cours Design de projets
chimiques avec le professeur Maher Boulos. L'avantage est que moins de 10 %
des déchets prendraient le chemin du dépotoir.»
À l'incinérateur, les déchets!
Un autre projet semblable conçu par des étudiants en génie chimique
consiste à incinérer les déchets domestiques non récupérables à l'aide de
gaz. Pour éviter toute pollution, les gaz sont traités après combustion et
débarrassés de tout contaminant (métaux et substances) avant d'être relâchés
dans l'atmosphère.
Pour financer cette «b.a.» environnementale, il suffirait de vendre la
vapeur produite à une tierce partie et l'électricité à Hydro-Québec.
Récupérer le papier de façon optimale
Des étudiants ont évalué la possibilité de récupérer le plus de papier
résiduel possible, d'en extraire la fibre blanche et de mélanger cette fibre
à de la pâte fraîche, dans un pourcentage plus ou moins grand, de façon à
produire un papier de qualité à valeur marchande élevée. L'intention n'est
pas nouvelle, mais les façons de faire le sont, par exemple certaines
recettes pour enlever l'encre du papier et l'agencement des unités pour
séparer l'écume de la fibre. La rentabilité de cette technologie est par
contre tributaire de la fluctuation du coût du papier.
Récupération du plastique PET
Le polyéthylène, ou PET, est une matière plastique largement utilisée,
notamment pour la fabrication de bouteilles de boissons gazeuses.
«Actuellement, il n'existe dans le monde que quatre ou cinq usines de
recyclage chimique de PET, et ces usines n'utilisent pas la même technologie
que celle développée par les étudiants”, indique Nicolas Abatzoglou. L'usine
des futurs ingénieurs nettoie le plastique, le broie et, grâce à un réacteur
à la glycolyse, le soumet à une réaction chimique, pour ensuite récupérer le
monomère (agencement de molécules simples) à partir duquel le plastique a
été fabriqué. On récupère donc les unités structurelles, on les purifie,
puis on reforme un plastique de même qualité qu'on vend à des compagnies qui
vont le réutiliser pour divers usages. “En appliquant cette méthode, on
arriverait à récupérer entre 80 % et 90 % du plastique, affirme le
professeur. Et cette industrie serait plutôt rentable.»
Mais pourquoi de tels projets, économiquement viables et qui vont dans le
sens du développement durable, n'ont toujours pas été mis sur pied? «Tant
que notre société ne sera pas prête à investir un peu plus au départ, rien
ne sera fait», indique Nicolas Abatzoglou. C'est donc la responsabilité des
gouvernements, et aussi des contribuables, puisque si des MRC décidaient
d'aller de l'avant, elles devraient augmenter leurs taxes. «Mais une chose
est sûre : les étudiants qui ont participé à ce cours n'auront pas de
difficulté à trouver un emploi!» conclut le professeur.
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Nicolas Abatzoglou
Photo SSF : Roger Lafontaine
Maher Boulos Photo SSF : Roger
Lafontaine |