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Évaluation des compétences

La supervision est une activité professionnelle distincte qui repose sur une relation de collaboration qui comporte à la fois des éléments facilitateurs et évaluatifs (APA, 2014). L’évaluation en contexte de supervision constitue donc un élément central. À l’instar de la supervision, il s’agit d’un processus collaboratif qui s’appuie sur une rétroaction constructive et continue.  

Dans le contexte des programmes de formation initiale en psychologie, il inclut aussi des évaluations formelles :

  • l’évaluation formative, qui s’inscrit dans une démarche d’évaluation continue ayant pour objet d’assurer la progression de la personne étudiante;  
  • l’évaluation sommative, qui vise à sanctionner ou certifier le niveau de maîtrise des compétences. 

La rétroaction

En suscitant l’échange entre la personne superviseure et la personne supervisée, la rétroaction offre l’occasion de mieux comprendre son expérience ainsi que d’évaluer et de réfléchir sur ses apprentissages. Ainsi, lorsqu’elle est constructive, la rétroaction devient un outil d’influence important pour le développement de la personne supervisée qui cherche à accroître son autonomie professionnelle.

L’instauration d’une rétroaction efficace favorise :

  • la création d’un climat de collaboration;
  • la clarification des attentes, des forces et des limites;  
  • la mise en place de moyens d’amélioration;  
  • la stimulation de la motivation, de la confiance et de l’estime de soi;  
  • la progression graduelle des apprentissages;  
  • le soutien au développement du professionnalisme;  
  • l’amélioration des capacités d’autoévaluation et de réflexivité.

(Lechasseur, 2023)

La rétroaction est un exercice pouvant susciter de l’incertitude et de l’inconfort chez les personnes qui la transmettent. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit de demander un correctif à la personne supervisée ou lorsque cette dernière semble peu réceptive. On peut alors s’inquiéter de la heurter ou d’affecter son estime de soi. Pour éviter ce malaise, certaines personnes superviseures peuvent éviter, parfois inconsciemment, d’offrir une rétroaction claire sur ces aspects. 

Que la personne supervisée démontre des difficultés ou non, une rétroaction absente ou inefficace peut présenter les risques suivants : 

  • adoption ou le maintien de conceptions erronées ou de pratiques déficientes;
  • confusion quant aux comportements à modifier, à conserver ou à consolider;  
  • ralentissement de la progression des apprentissages;  
  • manque de renforcement des comportements positifs;
  • diminution de la motivation;  
  • abandon de bonnes pratiques;  
  • diminution de la qualité du service ou de l’intervention;  
  • augmentation du besoin d’encadrement.  

(Lechasseur, 2023)

  • Clarifier les attentes et les rôles respectifs. Assurer une compréhension commune des compétences et des objectifs d’apprentissage.
  • Offrir une rétroaction régulière et dès que possible après l’action.
  • Procéder par l’observation directe des comportements de la personne supervisée. Présenter les observations de façon spécifique et objective.
  • Considérer uniquement les aspects pouvant être modifiés. Se référer à des comportements observables, spécifiques et modifiables, non pas sur les caractéristiques de la personne.
  • Limiter le nombre de messages à l’essentiel. Se concentre sur un nombre raisonnable, réaliste et recevable de messages.
  • Présenter des messages constructifs et sans jugement. Démontrer du respect et de la sensibilité pour la réponse et les sentiments de la personne qui la reçoit. Miser sur l’accompagnement plutôt que sur le contrôle de la performance.  
  • Présente un équilibre entre les messages positifs et les messages correctifs.
  • Formule une description claire, concrète et détaillée des comportements à maintenir, à changer ou à améliorer.
  • Se déroule dans un environnement privé et au moment opportun où les personnes sont réceptives et émotionnellement disposées à s’engager dans un dialogue.  

Inspiré de : O’Brien et coll., 2003; Chowdhury et Kalu, 2004; Aasheim, 2012; Daele et Lambert, 2013; Drago-Severson et Blum-DeStefano, 2014; Henderson et coll., 2014; Burgess et al., 2015; Lafortune, 2017; Russell, 2019; Burgess et al., 2020; Falender et Shafranske, 2021; Guccione et Hutchinson, 2021; Lechasseur, 2023 

En dépit des meilleures intentions, il ne faut pas négliger la valeur affective que peut représenter l’action de donner ou de recevoir de la rétroaction. Cet exercice est bien souvent accompagné d’anxiété et d’incertitude de part et d’autre. C’est pourquoi la rétroaction exige d’être habile et sensible dans la façon dont elle est transmise. L’intégration des émotions et des réactions au dialogue de rétroaction est un élément essentiel à son efficacité afin de favoriser la réceptivité de la personne qui la reçoit, particulièrement lorsqu’elle se montre réticente à l’idée de recevoir une rétroaction et de reconnaître ses défis de développement (Côté et coll., 2018).

Voici quelques stratégies supplémentaires :  

  • Mentionner à la personne supervisée qu’il est normal de rencontrer des difficultés à un moment ou à un autre.
  • Décrire les difficultés en termes de comportements observables, en se fondant sur des faits et non sur des opinions.
  • Chercher à comprendre la perspective de la personne stagiaire sur les comportements mentionnés et écouter ses explications.
  • Moduler les échanges en fonction des réactions de la personne supervisée.
  • Formuler des attentes ou un comportement attendu en fonction des objectifs ou des compétences visés par le stage.
  • Proposer des moyens pour pallier les difficultés.
  • Mentionner que la perception de sa performance par la personne stagiaire peut différer de celle de la personne superviseure.
  • Rappeler la nécessité pour la personne stagiaire de faire confiance à la personne superviseure et pour la personne superviseure de lui faire confiance en retour.  

(Lechasseur, 2023)

En cas de résistance ou de réactions défensives

Que faire si la personne supervisée s’oppose à la rétroaction, qu’elle refuse de collaborer ou qu’elle exprime de la colère?  

  • Garder son calme et adopter une attitude constructive;
  • Identifier explicitement l’inconfort de la personne supervisée et lui proposer d’en explorer le motif ensemble;  
  • Mettre l’accent sur les points positifs, sans esquiver les éléments négatifs;
  • Décomposer les observations qui posent un problème et encourager la personne supervisée à s’approprier une part de la situation. 

(O’Brien et coll., 2003; Lechasseur, 2023)
 

Comme les personnes supervisées performantes répondent aux attentes, elles peuvent parfois donner l’impression de ne pas avoir besoin d’aide. Elles ont tout de même besoin d’être reconnues pour leurs efforts et d’être soutenues dans leur apprentissage.  

Pour aider la personne supervisée à progresser dans une zone optimale de développement, il s’agit de l’amener à se dépasser en lui offrant des défis qui l’encourageront à sortir de sa zone de confort, sans toutefois atteindre une zone de rupture qui la mettrait en échec.  

Les attentes, parfois élevées, envers ces personnes supervisées peuvent également être source d’anxiété cherchant à prouver leur excellence. La limite entre la stimulation et la pression peut être mince. La personne superviseure est invitée à être attentive et sensible aux réactions des personnes supervisées qui ne se donnent pas le droit à l’erreur. Cela les met à risque de freiner leur progression, d’affecter leur concentration et leur professionnalisme, mais aussi de développer des symptômes d’épuisement.

(Dyrbye et Shanafelt, 2016; Karimi-Aghdam, 2017; Laurin et coll., 2017)