TÊTE-À-TÊTE

Pierre Lacerte

Du journalisme c'est... du journalisme

par Bruno Levesque

Quand, comme Pierre Lacerte, on est issu d'une famille où tout le monde ou presque exerce ou a exercé le métier de journaliste, il n'y a rien de surprenant à ce qu'on embrasse cette carrière. Ce qui déconcerte chez Lacerte, c'est le chemin qu'il a emprunté pour y parvenir.

À 20 ans, Pierre Lacerte voulait devenir médecin. Installé en Europe depuis cinq ans, y ayant vécu une jeunesse pleine de voyages et de belles découvertes, il souhaitait revenir au Québec pour y étudier la médecine. <<Ça n'a pas adonné>>, commente-t-il laconiquement. Le jeune étudiant s'inscrit donc en biologie, à l'Université de Sherbrooke, avec l'espoir d'entrer en médecine l'année suivante.

Après une année de biologie, Pierre Lacerte change de voie et fait son entrée à la Faculté de droit. <<Je ne savais pas au juste ce que je voulais exercer comme profession quand j'aurais terminé mes études, se souvient-il. Pour moi, le baccalauréat en droit constituait une formation de base intéressante qui pouvait ouvrir beaucoup de portes.>>

Pierre Lacerte garde un excellent souvenir de son passage à la Faculté de droit. <<Parmi les plus belles années de ma vie>>, affirme-t-il. Il se remémore avec plaisir son travail au Club Photo de l'Université et les activités organisées par l'Association générale des résidents de l'Université de Sherbrooke (AGRUS).

Le journalisme, via l'Asie

Une fois ses études terminées et son examen du Barreau réussi, Pierre Lacerte a quitté Sherbrooke pour effectuer un stage de six mois au Bureau d'aide juridique de Ville Saint-Laurent. Après ce stage, le jeune avocat décide de partir en voyage avant d'amorcer sa carrière. Il séjourne plus d'un an en Asie avant de revenir s'installer au Québec en 1982.

<<Quand je suis revenu, nous étions en pleine crise économique et les offres d'emploi étaient plutôt rares, raconte Pierre Lacerte. Je me suis dit que je pourrais tirer profit des notes de voyage que j'avais écrites et des nombreuses photos que j'avais prises. J'ai commencé par envoyer un article au Devoir, ne sachant même pas s'il serait retenu. Finalement, ils l'ont publié et j'ai commencé de cette façon à collaborer avec le quotidien montréalais. Je suis resté cinq ans à la pige, collaborant principalement avec Le Devoir, mais aussi avec La Presse, TV Hebdo, Décormag, Allure, etc.>>

Pendant toutes ces années, Pierre Lacerte continue de tenir des chroniques de voyages, mais ses horizons s'élargissent. Ces textes portent surtout sur la culture : entrevues avec des artistes, articles sur la décoration, chroniques de livres, de restaurants, etc.

Puis, un beau jour de 1987, le téléphone sonne chez Pierre Lacerte. Au bout du fil, le directeur du magazine Affaires plus demande à le rencontrer. <<Quand il m'a offert un emploi, je lui ai demandé s'il était certain de ne pas se tromper de personne>>, relate le journaliste, qui était bien conscient de n'avoir aucune connaissance du monde de la finance et des affaires.

Mais son patron ne semble guère préoccupé par cette méconnaissance des questions économiques. Il recherche un journaliste possédant une belle plume, quelqu'un de débrouillard, capable de comprendre une situation complexe et de l'expliquer à ses lectrices et lecteurs, et croit que Pierre Lacerte possède ces atouts. Pierre Lacerte hésite quelque peu, puis accepte le défi. Le travail a dû lui plaire, puisque, dix ans plus tard, il est encore journaliste pour le même magazine. Il y écrit sur toutes sortes de sujets : économie, immobilier, planification financière, assurances, monde bancaire.

Si, au départ, le fait de ne rien connaître du monde des affaires a quelque peu inquiété Pierre Lacerte, les années qui ont suivi ont donné raison à son patron. <<Un journaliste, dit-il, peu importe dans quel domaine il se spécialise, demeure un journaliste. Le rôle du journaliste est d'agir comme intermédiaire entre les experts et les lecteurs. Il est une courroie de transmission.>>

Pour illustrer son propos, Pierre Lacerte se remémore un article écrit sur Diane Dufresne il y a quelques années : <<Je ne suis pas un grand admirateur de Diane Dufresne, alors je ne la connaissais pas vraiment.>> Pour préparer son entrevue, le journaliste a fait des recherches. Il a lu les articles publiés sur la diva, interviewé l'entourage de l'artiste, discuté avec d'autres journalistes qui la connaissaient mieux, etc. <<Quand j'ai fait l'entrevue, j'étais prêt, raconte-t-il. Je connaissais très bien mon dossier.>>

Pierre Lacerte est formel. La même façon de procéder s'applique au monde des affaires : <<Récemment, j'ai écrit un dossier sur le Groupe Investors. Avant d'hériter de ce dossier, je connaissais cette entreprise comme tout le monde la connaît, ni plus ni moins. Mais, après m'être documenté, avoir fait une trentaine d'entrevues auprès de dirigeants, de représentants, de concurrents et de clients d'Investors, j'ai fini par bien la connaître.>>

Que faire, Monsieur le journaliste?

Après neuf années passées à s'intéresser professionnellement aux choses de l'argent, à écrire sur les placements, la planification financière, l'épargne, etc., Pierre Lacerte a dû acquérir une certaine expertise dans ce domaine. Aussi est-il bien difficile de résister à lui demander quelques conseils. <<Je ne suis pas un expert, rétorque-t-il aussitôt. Il y a sûrement, à l'Université, des gens bien plus au fait de ces questions que moi.>>

Néanmoins, après s'être fait tirer l'oreille, le journaliste y est allé de quelques remarques d'ordre général. D'abord, il trouve dommage que si peu de gens s'intéressent à la planification financière. Selon lui, tout le monde devrait se préoccuper de son avenir financier. <<À moins de ne pas avoir de descendance et de savoir qu'on va mourir très jeune>>, lance-t-il à la blague. Plus sérieusement, il ajoute : <<Si quelqu'un ne veut pas vivre ses dernières années au crochet des autres, ni de ses enfants ni de la société, il doit planifier sa retraite. Et plus on commence tôt, mieux ça vaut. Par exemple, une personne de 20 ans qui met 2500 $ par année dans un RÉER pendant dix ans se retrouve à 65 ans, si les taux d'intérêt se maintiennent à 8 ou 9 p. 100, avec quelque 900 000 $ en poche.>>

Le premier conseil que donne Pierre Lacerte est de liquider ses dettes : cartes de crédit, marges de crédit, emprunts personnels, etc. Une fois les dettes réglées, le journaliste conseille d'investir dans des REÉR. Quel type de produit? Cela dépend de nos besoins. Il cite une règle générale qui suggère de placer 10 p. 100 de son épargne pour répondre à ses besoins de liquidité, 40 p. 100 pour retirer des revenus fiables et réguliers et investir les 50 p. 100 qui restent dans des actions, des fonds communs de placement ou dans l'immobilier, bref des produits plus risqués, mais dont les taux de rendement sont beaucoup plus élevés. Cependant, ajoute-t-il, chaque personne doit analyser ses besoins et sa personnalité avant de décider quelle proportion de ses épargnes elle veut consacrer à chacune de ces catégories.

Selon Pierre Lacerte, il faut lire sur le sujet, s'informer et, si on en éprouve le besoin, rencontrer un conseiller financier. Il explique que les conseillers ne font pas que placer l'argent des autres, mais qu'ils peuvent aussi vérifier les testaments et les assurances de leurs clients. Ils vont aussi les aider à faire leur budget, à analyser leurs besoins, leurs objectifs financiers, etc.

Le journaliste raconte qu'il a récemment fait vérifier l'état de ses affaires personnelles par un conseiller financier pour un article qu'il avait à rédiger. S'il refuse d'être comparé au cordonnier mal chaussé de l'histoire, Pierre Lacerte avoue cependant que, même si la planification financière est quelque chose d'important pour lui, certains détails avait été négligés et qu'il est sorti de l'exercice mieux outillé pour faire face à l'avenir.