Serge Cabana
Éditeur

On ne l'entend plus. Trop pressés. Trop de bruit, trop de friture sur la ligne. La petite voix intérieure, celle-là même qui, devant les scénarios de vie que nous envisageons, déclenche le signal du confort ou du malaise de l'âme en chacun de nous, se serait-elle éteinte? Ou serait-ce qu'elle ne saurait plus couvrir le bruit ambiant pour atteindre le seuil de notre conscience?

Maintenant que nous ne comptons plus sur le curé, le patron ou le père de famille pour nous indiquer ce qui est bien ou mal, nous voilà, tout un chacun, aux prises avec notre propre conscience. Quel fardeau! Toujours cette obligation de réfléchir, d'analyser, de décider. Surtout que depuis la fameuse équation d'Einstein, nous savons, à jamais, que tout est toujours relatif. Fini le Vrai et le Faux, le Bien et le Mal, alignés sur deux colonnes. Aujourd'hui, «ça dépend». Et tout «dépend du reste». Et personne ne peut vraiment savoir pour l'autre.

Or c'est avec cette conscience confuse que l'individu, en ce début de 21^e siècle, se tourne vers ses dirigeants, en particulier politiques et judiciaires, afin qu'ils prennent d'importantes décisions sur des questions déchirantes : manipulations génétiques allant des mères porteuses et de la fécondation in vitro jusqu'au clonage, soutien social aux défavorisés, impor-tance des enjeux environnementaux, intégration multiethnique, collaboration Nord-Sud… Les questions existentielles auxquelles doit désormais faire face la conscience sociale des sociétés postindustrielles sont énormes. Elles méritent d'être sérieusement considérées et analysées à l'aide du processus bien connu du débat social, où experts et simples citoyens ont l'occasion de discuter et de réfléchir, influençant, chemin faisant, les décideurs politiques.

Le monde est désormais complexe. Il pourrait devenir dangereux que, vu cette complexité, nous abandonnions les questions éthiques entre les seules mains des scientifiques, des politiciens et des juristes, plus ou moins manipulés par les lobbys les plus puissants.

La petite voix pourra-t-elle faire contrepoids?

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