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Décès de Mme Sylvie Breton (1961 - 2023)

Hommage à une patiente partenaire engagée et d'exception

De gauche à droite, Pr François-Michel Boisvert, directeur scientifique de l'IRCUS, Eva Villalba, Directrice générale Coalition priorité cancer au Québec, feue Sylvie Breton, patiente partenaire, et Karine Tremblay, coordonnatrice scientifique de l'IRCUS.
De gauche à droite, Pr François-Michel Boisvert, directeur scientifique de l'IRCUS, Eva Villalba, Directrice générale Coalition priorité cancer au Québec, feue Sylvie Breton, patiente partenaire, et Karine Tremblay, coordonnatrice scientifique de l'IRCUS.

Photo : UdeS - Mathieu Lanthier

C’est avec une grande tristesse que nous vous partageons la nouvelle du décès, le 20 mai dernier, de Mme Sylvie Breton.

Affligée d’un cancer du foie rare, le cholangiocarcinome, Sylvie nous avait tant habitués à ses succès à repousser la maladie, que son décès nous laisse pantois. Depuis 2018, elle a participé à plusieurs projets de recherche afin de contribuer à nourrir l’espace scientifique. Navigant d’un essai clinique à un autre, chacune de ses victoires lui donnait une énergie qui semblait intarissable. Durant son parcours de soins, échelonné sur cinq années, elle s’est investie sans relâche pour influencer l’avancement du partenariat patient, la recherche sur les cancers rares et l’accès aux tests génomiques ainsi qu’aux essais cliniques en guise d’option de traitement plutôt que de dernier recours. Pas étonnant qu’elle n’ait pas hésité non plus à prendre position pour l’accès aux données de santé!

Impliquée depuis 2019 dans le Comité stratégique patients partenaires du Centre de recherche du CHUS (CRCHUS), elle y agissait à titre de co-présidente et en était une fidèle promotrice. D’une rigueur absolue, tous les documents officiels de ce groupe portent sa trace. Elle est d’ailleurs à l’origine de la formation offerte aux patients partenaires qui souhaitent participer à des comités d’évaluation.

De la même façon, elle s’est engagée auprès du comité exécutif de l’Institut de recherche sur le cancer de l’Université de Sherbrooke (IRCUS) dès sa fondation et a contribué de façon significative à la Classique cyclo-marche de Sherbrooke 2021, une activité de financement au profit de l’IRCUS et de la Société de recherche sur le cancer (la Société). C’est alors qu’elle a entamé des pourparlers avec la Société et la Fondation canadienne du foie, qui ont permis la création de quatre nouvelles subventions canadiennes de 125 000 $ exclusivement dédiées au cancer du foie.

Son implication et son influence ont largement débordé les frontières de l’Estrie. Notamment aux États-Unis où elle s’est impliquée auprès du Cholangiocarcinoma Foundation afin, avec une poignée de patientes et patients, de créer une branche canadienne de l’organisme. Toutes ces organisations et bien d’autres ont pu compter sur son indéfectible engagement. D’une redoutable efficacité, elle a su sensibiliser de nombreux acteurs clés dans le domaine du cancer concernant notamment le séquençage génomique. Elle est même parvenue à convaincre le gouvernement du Québec d’inclure dans sa politique sur les maladies rares, les cancers qui le sont.

Brisant les plafonds de verre, elle est devenue la première patiente partenaire à réaliser différents rôles :

  • Initier une étude clinique et influencer l’orientation de la question vers les cancers digestifs hauts, pour que les cancers rares soient davantage étudiés.
  • Suivre et réussir les formations qui permettent aux patients partenaires d’être co-chercheurs et de procéder au consentement des participants à la recherche.
  • Co-présider et co-signer le rapport sur les États généraux de la lutte contre le cancer de la Coalition priorité cancer au Québec (un article du Devoir a d’ailleurs traité de son implication).

Pour faire valoir sa voix, elle aurait pu aisément prendre appui sur son bagage académique en sciences infirmières et en droit. Elle se refusait pourtant à le faire puisque, pour elle, être patiente partenaire, n’appartenait pas qu’aux diplômés. Il s’agissait avant tout d’une posture d’engagement dans ses propres soins et services de santé, en faisant équipe avec ses personnes soignantes, et en prenant soin d’eux aussi ! Elle se faisait d’ailleurs un devoir de reconnaître labeur accompli par les travailleuses et travailleurs qu’elle croisait : de son médecin spécialiste aux spécialistes de l’entretien qui veillaient assidûment à la désinfection durant la pandémie.

Forte de cette conviction que la santé est une responsabilité partagée et qu’il est essentiel d’apprendre à naviguer le système, elle a pleinement assumé ses valeurs et maintes fois relayé ses savoirs expérientiels, en particulier auprès de plusieurs patientes et patients atteints d’un cancer difficile à traiter. Ils ont pu à leur tour agir avec confiance sur leur propre condition et certains sont devenus, comme elle, des patients partenaires. Elle allait même jusqu’à être sensible au fait que, sans le cancer, elle n’aurait pas connu plusieurs personnes grandement appréciées.

Encore il y a quelques jours, de son lit d’hôpital, elle s’intéressait à l’amélioration continue des pratiques, en discutant avec le personnel dans une réelle posture de co-construction… pour les autres qui auront à vivre ce parcours!

Son message à nous toutes et tous : à vous de poursuivre!