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Selon les professeures et professeurs du Département d'histoire

Douze ouvrages marquants de la dernière décennie en histoire

Nous avons demandé aux professeures et professeurs du Département d'histoire de l'Université de Sherbrooke de nous présenter, chacune et chacun, un ouvrage marquant de la dernière décennie, associé à un de leurs champs d'intérêts. De belles découvertes en perspective!

Enfermements

Isabelle Heullant-Donat, Julie Claustre, Élisabeth Lusset et Falk Bretschneider

Une suggestion de la professeure Sophie Abdela

Il ne s’agit pas d’un seul ouvrage, mais de trois, appartenant à la même série : Enfermements. Chacun des ouvrages est un collectif, résultat de journées d’étude rassemblant des spécialistes de l’histoire de l’enfermement. Ils abordent des thèmes importants : les liens entre le cloître et la prison (2011), les règles et dérèglements en milieu clos (2015) et le genre (2017).

Ces trois volumes donnent le coup d’envoi à une effervescence historiographique toute nouvelle. Les auteurs et autrices font éclater le monde de l’enfermement pour déborder les limites des pénitenciers et explorer d’autres formes de contrainte physique comme le couvent, la vie monastique, les institutions de charité, le travail forcé, etc. Touchant une immense période qui s’étend du VIe au XIXe siècle, les trois livres misent sur les continuités plutôt que sur les ruptures, sur les points de convergence plutôt que sur les écarts. Ensemble, ils marquent le renouvellement de tout un domaine d’étude et l’avènement d’un nouveau chantier.

  • HEULLANT-DONAT, Isabelle, et al., Enfermements III. Le genre enfermé : hommes et femmes en milieux clos (XIIIe-XIXe siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, 2017, 222 p.
  • HEULLANT-DONAT, Isabelle, et al., Enfermements II. Règles et dérèglements en milieux clos (IVe-XIXe siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, 2015, 464 p.
  • HEULLANT-DONAT, Isabelle, et al., Enfermements. Le cloître et la prison (VIe-XVIIIe siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, 2011, 376 p.

Flesh reborn. The Saint Lawrence Valley Mission Settlements through the Seventeenth Century

Jean-François Lozier

Une suggestion du professeur Léon Robichaud

L'histoire du Canada et de la Nouvelle-France délaisse très rapidement la présence autochtone ou les repousse en marge du peuplement européen. L'ouvrage de Jean-François Lozier ramène les populations algonquiennes et iroquoïennes au coeur de la Nouvelle-France, soit la vallée du Saint-Laurent. En mettant l'accent sur les nuances et les identités, l'auteur nous fait découvrir des individus et des groupes qui sont confrontés aux déstructurations et aux restructurations accompagnant l'arrivée des Français dans la région : commerce, évangélisation, épidémies, guerres, captivité, dispersion, regroupement. Nous découvrons des gens confrontés à des choix, qui redeviennent des acteurs de l'histoire. Cet ouvrage vient ainsi changer la manière d'aborder les questions autochtones dans la recherche et l'enseignement concernant la Nouvelle-France.

  • LOZIER, Jean-François, Flesh Reborn. The Saint Lawrence Valley Mission Settlements through the Seventeenth Century, Montréal et Kingston, McGill-Queen's University Press, 2018, 448 p.

Le monde rural québécois aux XVIIIe et XIXe siècles. Cultures, hiérarchies, pouvoirs

Christian Dessureault

Une suggestion du professeur Benoît Grenier

La contribution de cet ouvrage est colossale. Enfin, on trouve réunis dans un livre les textes de Christian Dessureault. Certes, il ne s’agit pas des « œuvres complètes », mais la sélection opérée par les artisans derrière ce projet constitue une réelle immersion et introduction à la contribution du professeur Dessureault, récemment retraité du Département d’histoire de l’Université de Montréal.

C’est que ce dernier, figure incontournable de l’historiographie du monde rural laurentien, chercheur infatigable et remarquable par son érudition, mentor pour de nombreux historiens, acteur de premier plan des colloques franco-québécois d’histoire rurale et historien primé, n’a pas été jusqu’ici très enclin à colliger ses travaux, ni même à publier sous forme de livre ses principales interprétations. En effet, en dépit d’articles très nombreux et de quelques codirections d’ouvrages collectifs, il faut bien admettre que son travail est trop peu connu en-dehors d’un cercle d’initiés. L’historien a effectivement été discret en terme de livres, si on fait abstraction de l’ouvrage publié conjointement avec Dépatie et Lalancette (Contributions à l’étude du régime seigneurial canadien, 1987), lequel remonte à ses travaux de maîtrise sur la seigneurie du Lac-des-Deux-Montagnes (1979). Mais de sa thèse, magistrale, sur l’inégalitarisme paysan, pas de livre sur les rayons de nos bibliothèques. C’est pourquoi il faut saluer cette publication et remercier ceux qui se font « passeurs » de cette œuvre : Christine Hudon, Léon Robichaud, Jean-René Thuot et Thomas Wien, collègues et anciens étudiants du professeur Dessureault. (Extrait de la recension faite pour la Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 72, n°4, p. 99-102)

  • DESSUREAULT, Christian, Le monde rural québécois aux XVIIIe et XIXe siècles. Cultures, hiérarchies, pouvoirs, Montréal, Fides, 2018, 434 p.

Idola Saint-Jean, l'insoumise

Marie Lavigne et Michèle Stanton-Jean

Une suggestion de la professeure Louise Bienvenue

« La logique démocratique veut que les derniers vestiges de l’aristocratie disparaissent, je veux dire l’aristocratie des sexes ». Ainsi s’exprimait Idola Saint-Jean, en 1928, dans un discours devenu célèbre. Sa vie durant, cette féministe montréalaise n’aura de cesse de défendre la cause de l’égalité entre hommes et femmes, s’exprimant dans un style plus radical que plusieurs de ses contemporaines.

Dans cette passionnante biographie écrite à quatre mains, Marie Lavigne et Michèle Stanton-Jean racontent la trajectoire de cette singulière militante. Bien que le nom d’Idola Saint-Jean (1879-1945) figure désormais dans les manuels scolaires et que sa statue soit bien en vue devant le Parlement de Québec, ce que l’on connaît d’elle se limite souvent au combat suffragiste qu’elle a mené pendant deux décennies. Dans cet ouvrage étoffé mais facile d’accès, d’autres facettes de ce fascinant personnage sont mises en lumière. On rencontre ainsi l’artiste de théâtre, la professeure de diction, la candidate politique ainsi que la journaliste de la radio et de la presse écrite. Bien entendu, les biographes s’attardent à l’activité de Saint-Jean comme pionnière du féminisme, dans un contexte où ses idées rencontrent une forte résistance. Quiconque souhaite se familiariser avec le mouvement des femmes de la première moitié du 20e siècle et visiter sous un autre angle l’histoire du Québec de cette période, se réjouira de cette lecture.

  • LAVIGNE, Marie et STAUTON-JEAN, Michèle, Idola Saint-Jean, l’insoumise, Montréal, Boréal, 2017, 382 p.

De Marie de l'Incarnation à Nelly Arcan. Se dire, se faire par l'écriture intime

Patricia Smart

Une suggestion de la professeure Christine Hudon

L'ouvrage se lit comme un roman. Le projet initial de Patricia Smart était de parcourir l'histoire du Québec du point de vue des femmes, à partir de leurs récits autobiographiques. Rapidement, l'autrice a réalisé qu'entre les Relations de Marie de l'Incarnation au XVIIe siècle et les écrits de Claire Martin dans les années 1960, aucune autobiographie féminine n'avait été publiée. Patricia Smart s'est donc tournée vers d'autres écrits intimes comme les journaux personnels, la correspondance et, pour la période plus récente, l'autofiction.

À travers ces voix, c'est non seulement la grande trame historique qui se dessine. C'est aussi des histoires d'effacement, voire d'anéantissement de soi, mais aussi d'affirmation de sa personne et de son identité. Magnifique et passionnant!

  • SMART, Patricia, De Marie de l’Incarnation à Nelly Arcan. Se dire, se faire par l’écriture intime, Montréal, Boréal, 2014, 432 p.

Le vrai visage du Moyen Âge. Au-delà des idées reçues

Nicolas Weill-Parot et Véronique Sales

Une suggestion de la professeure Geneviève Dumas

Érigé en exemple paradigmatique de l'obscurité, de la violence, de l'injustice et de l'ignorance, le Moyen Âge est une période qui, dans les représentations collectives, a une image particulièrement faussée, plus déformée que les autres périodes historiques. Ce livre rassemble une vingtaine d'éminents chercheurs en histoire médiévale pour revoir ces idées reçues, notamment à l'aune des plus récentes recherches. En ressort un portrait  plus conforme à la réalité des sources et une analyse qui, sans complaisance aucune, remet les pendules à l'heure.

  • WEILL-PAROT, Nicolas et SALES, Véronique, Le vrai visage du Moyen Âge. Au-delà des idées reçues, Paris, Éditions Vendémiaire, 2017, 420 p.

Leaflet Cookbook : Recipes for Creating Dynamic Web Maps

Numa Gremling

Une suggestion du professeur Tristan Landry

Un des livres parus en 2019 que j’ai particulièrement apprécié est un livre de recettes, mais pas au sens traditionnel du terme, car ce sont des recettes pour programmer des cartes dynamiques Web. Si l’on connaît bien le tournant spatial en histoire, on sait moins que l’on peut publier une carte en ligne avec seulement du code Leaflet.

Le livre de Numa Gremling est très bien écrit, il prend les choses depuis le début. Il prend certes pour acquis qu'on sait formater une page html, mais sinon, il est très systématique, progressant de la base vers le haut. Leaflet n'est pas un langage en soi, c'est une bibliothèque de codes JavaScript géo-orientée. Autrement dit, son développeur, Vladimir Agafonkin, a défini une série de fonctions qui, dans JavaScript, nous permettent d'afficher un fond de carte et de positionner dessus des objets avec les x et les y. On peut donc créer des marqueurs, définir le contenu des infobulles, ajouter des images, dessiner des polygones et bien d’autres choses encore seulement en programmant. L’avantage du code en comparaison avec des outils comme Mapbox est que l’on demeure propriétaire à 100% du contenu intellectuel.

  • GREMLING, Numa, Leaflet Cookbook : Recipes For Creating Dynamic Web Maps, Chugiak, Locate Press, 2019, 336 p.

Normes religieuses et genre. Mutations, résistances et reconfiguration (XIXe-XXIe siècle)

Florence Rochefort et Maria Eleonora Sanna

Une suggestion du professeur Patrick Snyder

Cet important ouvrage collectif pose la question des rapports religions et reproductions/non reproductions des normes de genres. Les chapitres démontrent comment les religions se sont positionnées face aux droits des femmes et à la liberté sexuelles des groupes LGBTQ+.

L’ouvrage soutient qu’il faut penser les rapports religions et genres dans la complexité. De fait, les grandes traditions religieuses sont aujourd’hui déterminées par de nombreux courants conservateurs et libéraux. Les religions s’inscrivent aussi dans des aires géographiques contrastées. Face à la critique des genres, les courants conservateurs défendent une vision traditionnelle de la sexualité centrée sur une approche essentialiste. L’hétérosexualité reproductive est considérée comme la volonté de Dieu.

Toutefois, l’ouvrage explore aussi les adaptations et reconfigurations des courants libéraux dans des sociétés laïques à partir de l’analyse du genre. Ces courants féministes et LGBTQ+ s’appuient sur le constructivisme social pour adapter leurs croyances aux valeurs contemporaines déterminées par la liberté sexuelle et les droits égaux pour toutes et tous. L’ouvrage souligne aussi l’importance de l’individu dans l’interprétation des normes religieuses. L’individu, conservateur ou libéral, renégocie les normes religieuses à partir de ses propres critères. Certains individus peuvent avoir des lectures plus restrictives ou plus libérales des normes religieuses que leur courant d’appartenance. Voilà qui complexifie la compréhension des normes religieuses contemporaines.

L’ouvrage est un dialogue interdisciplinaire (histoire, sociologie, sciences des religions, philosophie, anthropologie et politique) sur un champ d’étude souvent négligé. Il permet de sortir de la simplicité médiatique qui présente habituellement « la religion » comme un bloc monolithique intégriste en constante opposition aux avancées des sociétés laïques sur la liberté sexuelle et l’égalité des genres. Il est aussi l’objet de relectures qui adaptent les normes religieuses aux sociétés dans lesquelles elles évoluent. Toutefois, il ne faut jamais négliger l’influence néfaste des courants conservateurs sur les droits des femmes et des groupes LGBTQ+.

  • ROCHEFORT, Florence et SANNA, Maria Eleonora, Normes religieuses et genre. Mutations, résistances et reconfiguration XIXe-XXIe siècle, Paris, Armand Colin, 2013, 320 p.

Segregation. A Global History of Divided Cities

Carl H. Nightingale

Une suggestion du professeur Harold Bérubé

Cet ouvrage est une contribution majeure en histoire urbaine à plusieurs égards, mais sa principale distinction est d’incarner parfaitement l’application d’une approche transnationale (ambitieuse) à un phénomène urbain particulier, la ségrégation raciale dans les villes. Nightingale a été non seulement en mesure d’étudier et de comparer différentes villes autour du monde, mais de suivre d’assez près la diffusion des outils et stratégies utilisées pour mettre en place et renforcer cette ségrégation, que ce soit dans le contexte colonial en Inde ou de « Jim Crow » aux États-Unis.

Nightingale est devenu, par la suite, un des principaux animateurs de cette intégration de l’approche transnationale à d’autres problématiques urbaines.

  • NIGHTINGALE, Carl H., Segregation. A Global History of Divided Cities, Chicago, University of Chicago Press, 2012, 536 p.

Au risque de la conversion. L'expérience québécoise de la mission au XXe siècle (1945-1980)

Catherine Foisy

Une suggestion du professeur Maurice Demers

Professeure au Département de sciences des religions de l’UQÀM, Catherine Foisy vient combler un vide historiographique significatif avec cet ouvrage en éclairant une page extrêmement importante de notre histoire nationale : les expériences vécues par les missionnaires catholiques de 1945 à 1980.

Tiré de sa thèse de doctorat réalisée sous la direction de Jean-Philippe Warren à l’Université Concordia, le livre focalise sur la période la plus significative et la plus riche en transformations de l’expérience missionnaire québécoise au XXe siècle. L’auteure explique que « centrée sur [...] une période allant d’un recrutement intense à une stagnation, puis à un déclin rapide des missions, notre étude cherche à comprendre la manière dont les Sœurs Missionnaires de l’Immaculée-Conception, les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame des Anges et les Sœurs Missionnaires du Christ-Roi ainsi que la Société des Missions-Étrangères du Québec ont vécu ces transformations ». Cet objectif est largement atteint en focalisant sur les instituts de fondation québécoise.

L’ouvrage est divisé en deux parties. Explorant l’infrastructure sur laquelle se développent les missions québécoises, la première partie débute en étudiant l’état du catholicisme au Québec avant la Révolution tranquille et les changements de Vatican II. Catherine Foisy y analyse aussi les ressources matérielles et financières des instituts pour réaliser et faire connaitre leurs œuvres. L’impact de la fermeture de la Chine suite à la révolution communiste de 1949 est également considéré dans un des chapitres. L'autrice aborde ensuite les pratiques missionnaires à l’aube du concile et les innovations que ces derniers utilisent pour rejoindre la population. Enfin, dans le dernier chapitre de la première partie, elle traite du regard que portent les religieuses et les religieux sur la Révolution tranquille et l’aggiornamento. On est sensibilisé au choc vécu par plusieurs missionnaires à leur retour au Québec et on découvre comment les luttes syndicales ont parfois mis en opposition des membres d’une même communauté.

La deuxième partie de l’ouvrage, qui traite de la période allant de 1968 à 1980, analyse comment le concile a suscité une transformation des missions et une adaptation des instituts missionnaires aux nouvelles réalités de l’époque. Le livre nous renseigne effectivement sur comment l’effort missionnaire est devenu « un espace de convergence » pour recevoir et expérimenter les principes de Vatican II. Il documente aussi très bien comment les instituts missionnaires se sont positionnés face à Vatican II et ont modifié leurs grandes orientations suite aux expériences dans les pays de mission. Il permet ainsi de réhabiliter l’apport des missionnaires dans la mémoire collective québécoise. 

  • FOISY, Catherine, Au risque de la conversion. L'expérience québécoise de la mission au XXe siècle (1945-1980), Montréal, McGill-Queen's University Press, 2017, 344 p.

Violent Intermediaries : African Soldiers, Conquest, and Everyday Colonialism in German East Africa

Michelle R. Moyd

Une suggestion du professeur Patrick Dramé

J’ai dédié la majeure partie de ma carrière de professeur spécialiste de l’histoire africaine à l’étude de l’expérience coloniale de la France en Afrique de l’Ouest et plus particulièrement à la problématique et aux enjeux du « maintien de l’ordre » en Afrique Occidentale Française aux XIXe et XXe siècles. Pour ce faire, je porte une attention particulière à l’étude du rôle des soldats « indigènes » communément appelés tirailleurs sénégalais dans l’expansion coloniale et leurs fonctions dans l’occupation des territoires conquis et le maintien de la « paix gallica ». Plusieurs de mes travaux (Dramé, 2007, 2010, 2016) analysent le recrutement de ces soldats, leur conditionnement et leur implication dans la répression des révoltes et dans la défense nationale de la France durant les deux guerres mondiales.

Le champ d’étude du maintien de l’ordre et de la violence en contexte colonial a été particulièrement marqué par l’important ouvrage Violent Intermediaries: African Soldiers, Conquest, and Everyday Colonialism in German East Africa. Michelle R. Moyd, professeure d’histoire à l’Université d’Indiana, y étudie, dans une perspective d’histoire sociale, la vie quotidienne des Askari des territoires de l’Afrique de l’Est sous domination coloniale allemande. L’originalité de cet ouvrage réside dans l’étude des fonctions quotidiennes des Askari comme agents du colonialisme, mais aussi et surtout dans l’analyse patiente, minutieuse et fine de la vie quotidienne de ces soldats coloniaux comme maris, pères de famille, collecteurs d’impôts, etc. La perspective de microhistoire qui a été mise de l’avant par Michelle Moyd permet donc de jeter un regard novateur sur un aspect négligé dans l’historiographie.

  • MOYD, Michelle R., Violent Intermediaries: African Soldiers, Conquest, and Everyday Colonialism in German East Africa, Athens, Ohio University Press, 2014, 304 p.

Le bracelet de parchemin. L'écrit sur soi au XVIIIe siècle

Arlette Farge

Une suggestion du professeur Jean-Pierre Le Glaunec

Au XVIIIe siècle, des hommes et des femmes au statut précaire, retrouvés morts sur les routes ou ailleurs, et dont les corps sont inventoriés par la police pour identification, portent sur eux de menus objets, traces d'écrits malhabiles : billets, lettres, missives, prières. Le plus émouvant est sans doute le bracelet de parchemin. Découvert il y a peu de temps dans les archives au milieu des procès-verbaux, ce minuscule morceau de papier attaché au poignet par un fil rouge n'avait pas été jusque-là aperçu par les chercheurs.

C'est avec une remarquable attention que l'historienne des « intensités faibles » déplie ce bracelet, et d'autres billets, pour y lire les traces écrites, témoins d'une vie.

  • FARGE, Arlette, Le bracelet de parchemin. L'écrit sur soi au XVIIIe siècle, Paris, Bayard Éditions, 2003, 120 p.