Sommets Vol. XVII No 2 - Printemps-été 2004


Prof d'histoire, histoire de prof

par Sylvie Couture

Pour Bernard Chaput, tout est histoire...

Il ne serait donc pas exagéré de dire que ce prof d'histoire fait partie de l'histoire de l'Université de Sherbrooke.

 


Bernard Chaput
Doyen
Faculté des lettres et sciences humaines

 

Sa voix puissante résonne sur les murs de la salle du conseil. Il y met la même intensité, la même conviction, la même passion que dans un amphithéâtre rempli à craquer d'étudiants nouvellement épris de l'histoire du Moyen Âge. Pourtant, Bernard Chaput est tout simplement en train de raconter à une seule personne la petite histoire qu'il vit depuis maintenant 34 ans avec les quelque 4500 étudiants qui ont assisté à ses cours. Mais quelle histoire! «Parfois, je baisse la voix à un point tel que les étudiants ont peine à m'entendre», confie-t-il avec faits et gestes à son auditoire restreint. «Et lorsque je suis sur le point de les perdre, BANG!, je les fais sursauter dans une déclaration à l'emporte-pièce… Je ne veux quand même pas qu'ils s'endorment!» déclare-t-il, faussement outré.

Flower power

Bernard Chaput est tout un personnage. Il a commencé à enseigner à l'Université de Sherbrooke au temps du flower power, comme il dit. Le début des années 1970, ce n'est pas d'hier. Aussi, quand on lui demande son plus beau souvenir, on s'attend à le voir fouiller longuement dans sa mémoire phénoménale afin d'y faire surgir la multitude de faits cocasses qui balisent sa longue carrière de prof. Mais non! Il répond spontanément : «Mon plus beau souvenir, c'est toujours le cours que je viens de donner.» Et le voilà en train de s'enflammer en parlant des évaluations élogieuses que ses étudiants lui ont remises et en décrivant tout le plaisir que peut ressentir un professeur quand s'allume cette petite lueur de compréhension dans les yeux de ses nouveaux disciples. Puis, il lance avec satisfaction : «J'ai la chance de gagner ma vie en exerçant mon hobby préféré!»

Quoi de plus captivant que d'exercer son hobby 24 heures sur 24? Bernard Chaput a participé à de nombreux voyages d'études avec des étudiants, mais il se rappelle plus particulièrement le premier, en 1972, alors qu'il était parti en France avec 24 étudiants. «C'était tellement intense. Non seulement j'enseignais l'histoire 24 heures sur 24, mais nous étions dans l'histoire, en train de vivre l'histoire et de partager chaque moment.» Il souligne quelques anecdotes à saveur historique pour enfin affirmer dans un coup de tonnerre : «Mais tooout est historique!»

Prof un jour, prof…

Aujourd'hui, Bernard Chaput a 61 ans et tous ses cheveux blancs. «Moi, je vieillis d'un an chaque année alors que mes étudiants ont toujours le même âge.» Au début de sa carrière, à la fin de chaque année universitaire, il était bouleversé à l'idée de perdre des amis : «C'était un deuil chaque fois.» Avec les années, il a réussi à apprivoiser cette transition, peut-être en gardant des liens ou en suivant fièrement la carrière de certains d'entre eux.

Bernard Chaput est doyen de la Faculté des lettres et sciences humaines depuis 2001 , lui qui aime tant l'enseignement. «J'enseigne encore, s'empresse-t-il de préciser, mais j'étais devenu un peu bougonneux et je me suis dit qu'il était temps que je fasse ma part.” Espère-t-il que les gens se souviennent davantage de Bernard Chaput, le doyen? “Même si je suis très fier du mandat que j'ai accompli, je souhaite qu'on puisse lire sur ma tombe : PROFESSEUR D'HISTOIRE.»

L'Histoire nous le dira…

BChaput@USherbooke.ca

 

 


Daniel Charland
Histoire 1973
Professeur d'histoire
Séminaire Saint-Charles

 

 

Vivre l'Histoire sur le terrain, 24 heures sur 24

«J'étais l'un des étudiants qui ont participé au voyage en France avec monsieur Chaput, en 1972. Je le comprends lorsqu'il parle de l'intensité ressentie pendant un tel voyage avec ses étudiants. Vivre l'Histoire sur le terrain, c'est extraordinaire. Ce voyage comportait tout ce qu'on avait rêvé de connaître, de visiter, de toucher. Que nous regardions à droite ou à gauche, c'était l'Histoire. Nous étions dans l'Histoire. Comme nous étions de futurs enseignants, les portes s'ouvraient devant nous, et nous avons pu nous rendre au-delà des endroits touristiques.

«Après avoir vécu cette expérience, je rêvais de la vivre avec mes élèves. J'ai reproduit le modèle de monsieur Chaput en organisant moi-même de tels voyages, dont un auquel sa fille, Gaële Chaput, a participé. Il ne nous reste que de bons souvenirs de ces voyages.»

 

Yoland Bouchard
Histoire 1984, 1990
Professeur d'histoire
Mont Notre-Dame

 

«Un sacré bon prof»

Bernard Chaput ne cache pas sa fierté quand il parle de diplômés qui l'ont marqué par leur passion, comme Yoland Bouchard qui enseigne l'histoire au Mont Notre-Dame, à Sherbrooke, et dont il dit : «C'est un sacré bon prof sur lequel je n'entends que des commentaires dithyrambiques. Pour accéder au programme, il a su me démontrer qu'il était passionné. Il le démontre encore aujourd'hui.»

«Je me revois encore à la porte de son bureau, nerveux… Je n'avais pas la formation nécessaire, mais j'avais décidé de tenter ma chance en venant voir le directeur du programme. La porte s'est ouverte sur un homme souriant, vivant, un homme qui ne laisse pas les conventions nuire aux rencontres humaines. Il m'a donné une semaine… et un travail de 40 pages! Il m'a dit : “Tu dois me démontrer que j'ai raison de te donner une chance!” Aujourd'hui, avec mes élèves, je m'inspire souvent de ce moment pour me rappeler que c'est important de donner une chance, parfois même deux. Pour moi, c'était comme une poussée dans la vie.»

 

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