Étude de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques
Connaissez-vous la classe moyenne?
Alors que les politiciens se battent pour s’attribuer le rôle de grand défenseur d’une classe moyenne qui se plaint d’être en déclin, des chercheurs de l’Université de Sherbrooke ont voulu mettre des balises claires autour de ce terme en mal de définition. «La classe moyenne s’érode-t-elle vraiment?», se sont demandé les chercheurs François Delorme, Suzie St-Cerny et Luc Godbout, de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques.
Les résultats de l’étude démontrent que la classe moyenne n’a pas diminué au Québec, malgré la perception des citoyens à cet égard. «Si l’on compare l’évolution de la classe moyenne seulement du point de vue des revenus sans allocations ou politiques sociales, les gens ont raison de dire que la classe moyenne s’érode. Oui, les revenus ont baissé, mais la réalité, c’est que la population bénéficie de politiques sociales et de crédits d’impôt. Le soutien de l’État providence a permis de garder la classe moyenne à flot», explique François Delorme. Si l’on tenait seulement compte des revenus avant impôt, 29,4 % des ménages québécois feraient partie de la classe moyenne (contre 36,8 % en 1976). Par contre, avec le calcul des revenus après impôt, 46,7 % des ménages font partie de la classe moyenne (contre 45,8 % en 1976).
En comparaison avec le Canada, la classe moyenne québécoise fait bonne figure. La proportion des ménages de la classe moyenne était sensiblement la même en 1976 au Québec et au Canada. En 2010, elle avait diminué au Canada et légèrement augmenté au Québec.
Comment fait-on partie de la classe moyenne?
«Les ressources financières des ménages doivent se situer dans l’intervalle compris entre 75 % et 150 % du revenu médian.»
Une classe moyenne hétérogène
Si le pourcentage de ménages dans la classe moyenne est resté sensiblement le même depuis 1976, ce groupe englobe aujourd’hui bien plus que la famille traditionnelle «deux parents, deux enfants». La classe moyenne inclut aussi des personnes seules, des couples sans enfant et des familles monoparentales. «La classe moyenne n’est plus monolithique comme celle des années 70. Pour cibler la classe moyenne avec des politiques publiques, il faut donc une variété de mesures parce que chaque groupe a des besoins et des attentes différentes», souligne François Delorme.
En outre, l’étude démontre que le nombre de familles biparentales de la classe moyenne a diminué pour gonfler les rangs des familles à revenus élevés.
Des dettes à comptabiliser
En plus de la diminution du revenu avant les allocations et politiques sociales, l’endettement des ménages donne aussi l’impression que la classe moyenne s’érode. L’étude de François Delorme, Suzie St-Cerny et Luc Godbout ne contient toutefois pas de données sur les habitudes de consommation des Québécois. «Faire une étude sur l’endettement serait le prolongement naturel de cette étude sur la classe moyenne. Nous pourrions ainsi en superposer les résultats», indique François Delorme.