Comprendre l’effet d’un printemps plus chaud
Les événements climatiques extrêmes renforcent la sélection naturelle
Le changement climatique affecte aujourd’hui tous les écosystèmes de la planète, menaçant de nombreuses espèces, en raison des contraintes environnementales qu’il induit. Par exemple, l’équilibre fragile qui existe entre le temps où les bourgeons des arbres se développent au printemps et la reproduction de nombreuses espèces animales est aujourd’hui altéré par le réchauffement printanier.
Comprendre quel est l’impact de ce printemps qui devient de plus en plus chaud est devenu un enjeu majeur de l’écologie scientifique. Des chercheurs de l’Université de Sherbrooke et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) de France ont étudié l’impact du changement climatique sur une population de mésanges bleues (Cyanistes caeruleus) étudiée depuis plus de 25 ans, du début mai à la fin juin, dans une forêt de chênes au sud de la France, près de Montpellier. Comme beaucoup d’oiseaux, la mésange doit résoudre chaque année l’équation printanière qui consiste à fournir le maximum de nourriture à ses oisillons dans le laps de temps restreint où celle-ci est abondante, afin d’assurer leur survie. Cette nourriture se compose essentiellement de chenilles qui se nourrissent elles-mêmes des jeunes feuilles de chêne.
L’impact des journées chaudes
Dans un premier temps, l’étude démontre que les nichées qui subissent une journée extrêmement chaude (écart journalier aux normales saisonnières de plus de 5°C) durant la saison de reproduction voient les chances de survie des oisillons réduites, indépendamment des moyennes mensuelles de température. Par ailleurs, cet effet s’accompagne d’un renforcement de la sélection naturelle agissant sur la population. Les résultats, dans cette étude sur les mésanges, montrent que le réchauffement climatique tend à favoriser les oiseaux qui pondent le plus tôt au printemps. « La force de la sélection naturelle qui agit sur la date de ponte des mésanges est multipliée par deux lorsque 20% des nichées subissent une journée extrêmement chaude, commente Dany Garant, professeur en écologie à l’Université de Sherbrooke. Puisque la date de ponte a une base génétique (c’est-à-dire est héritable), on s’attend donc à une évolution de la date de ponte dans le futur sous l’action de la sélection naturelle induite par le changement climatique. » Le changement climatique contraint les espèces à un « printemps » toujours plus précoce, les forçant à s’adapter ou à disparaître. Cependant, l’évolution est un processus lent qui nécessite de nombreuses générations, limitant nécessairement l’adaptation au changement climatique qui est un phénomène rapide.