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Un des textes gagnants du Concours de vulgarisation scientifique 2021

Un bon son pour une alarme?

Olivier Robin et Louis Dermagne
Olivier Robin et Louis Dermagne

Photo : Fournie

Le « bip » des véhicules est un son bien connu : engins de chantier, chariot mobile dans les allées ou à l’extérieur d’un magasin. « Bip-bip-bip ». La population trouve cela gênant : imaginez votre four à micro-ondes qui sonnerait la fin de la cuisson toute la journée! Ce son est pourtant nécessaire, car un véhicule qui fait une manœuvre de recul peut être dangereux. On utilise des miroirs et des caméras pour améliorer la vision de la personne qui conduit et éviter les angles morts. Les alarmes sonores de recul préviennent aussi les personnes aux alentours avec leur fameux « bip ». Elles jouent tout le temps la même note, la même fréquence. On les appelle les alarmes tonales.

« Bip » ou « pscht »?

Attendez-vous à entendre de plus en plus de « pscht » avec l’arrivée d'une nouvelle alarme de recul qui fait un bruit proche d’une canette que l’on ouvrirait plusieurs fois de suite. « Pscht - pscht – pscht », un bruit qui contient de nombreuses fréquences pour cette alarme dite large bande. Comme l’énergie sonore est répartie sur plusieurs fréquences au lieu d’une seule, certains effets indésirables observés avec l’alarme tonale sont ici réduits. Ce son large bande dérangerait moins les personnes aux alentours et serait plus performant pour prévenir du danger selon différents travaux de recherche.

Résultats de mesure de la cartographie de la pression acoustique en laboratoire superposés au dessin d’une rue à des fins d’illustration. (a) Pour une alarme tonale; (b) Pour une alarme large-bande.
Résultats de mesure de la cartographie de la pression acoustique en laboratoire superposés au dessin d’une rue à des fins d’illustration. (a) Pour une alarme tonale; (b) Pour une alarme large-bande.
Photo : Fournie

Pour la première fois, une étude a comparé point par point la performance de ces deux alarmes. Un match dans lequel s’affrontent « bip », tenante du titre et présente depuis les années 1960, et « pscht », arrivée dans les années 2000. Un exemple des résultats obtenus est superposé au dessin d’une rue pour mieux visualiser le son produit par chaque alarme et son effet sur les personnes proches.

Début de match

Le match commence avec un triathlon en laboratoire pour vérifier comment les alarmes projettent leur son avec les tests de la salle, du sol et du montage. Épreuves toutes importantes, car les véhicules peuvent reculer à l’extérieur ou dans des bâtiments ayant une acoustique très variable. Ils peuvent rouler sur des sols qui réfléchissent le son (le béton) ou qui absorbent le son (la neige). Enfin, les alarmes sont souvent installées à l’endroit où c’est le plus simple, mais pas toujours le meilleur… Une bonne alarme de recul devrait fonctionner dans toutes ces conditions.

Dans une salle sans écho ou avec une réverbération importante, l’alarme large bande remporte un premier point, car le son est surtout dirigé vers l’arrière, alors que l’alarme tonale produit un son fort dans toutes les directions. Ce premier point obtenu pour « pscht » est suivi d’un second, car le type de sol change très peu le son qu’elle produit. Déjà 2 à 0. Enfin, quand les alarmes sont montées sur un simple support ou en arrière d’une boite de la taille d’un chariot élévateur, « pscht » produit toujours un son plus uniforme que « bip ».

Épreuve finale

Après ce tour du chapeau, c’est l'épreuve finale sur véhicule. Chaque alarme est installée sur un chariot élévateur qui recule dans un couloir industriel de 30 mètres, où le niveau de bruit est mesuré tous les deux mètres. Avec l’alarme tonale, le niveau sonore reste toujours élevé, peu importe où est le chariot. Avec l’alarme large bande, le niveau sonore change clairement en fonction de la position du chariot, permettant de mieux avertir de son arrivée tout en limitant la gêne. Après une telle victoire, on devrait entendre plus de « pscht » dans nos vies. Tendez l’oreille!

À propos d'Olivier Robin
Olivier Robin a été professionnel de recherche durant plus de six ans et est maintenant professeur depuis septembre 2021 au sein du Centre de recherche Acoustique-Signal-Humain de l’Université de Sherbrooke (Département de génie mécanique, Faculté de génie). Ses travaux ont conduit au développement de collaborations internationales avec la France, l’Italie et les États-Unis et à l’écriture de plus de 40 publications en journal dans le domaine de la vibroacoustique et de l’imagerie vibratoire. Il s’implique fortement dans le transfert et la valorisation des connaissances vers le grand public et développe des formations pour enrichir les compétences générales en communication scientifique.

À propos de Louis Dermagne
Louis fait partie du Centre de recherche Acoustique-Signal-Humain de l’Université de Sherbrooke. Il travaille sur la synthèse de champs sonores à partir d’enregistrements de microphones sphériques et de simulations, avec pour objectif de conserver le réalisme physique. Son intérêt pour la recherche réside principalement dans l’expérience procurée par la reproduction d’un champ sonore. Enseigner, diffuser, faire comprendre la science à toutes personnes intéressées sont pour lui un plaisir qui pourrait devenir un moteur de vie.

À propos du concours
L’Université de Sherbrooke tient annuellement un concours de vulgarisation scientifique dont les objectifs sont de stimuler des vocations en vulgarisation scientifique et d’augmenter le rayonnement des travaux de recherche qui s’effectuent à l’Université, qu’ils soient de nature fondamentale ou appliquée.


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