Concevoir des applications Web tirant parti de la technologie de la chaîne de blocs
Partenariat entre EOS Nation et 14 futurs ingénieurs en informatique
Quatorze futurs ingénieurs en informatique de l’Université de Sherbrooke concevront un système de comptabilité, paiement et gestion pour les petites et moyennes entreprises, sous la bannière CryptoSys, dans le cadre de leur projet de fin de baccalauréat. Ils miseront sur une technologie tendance, la chaîne de blocs, communément appelée blockchain.
En partenariat avec EOS Nation, un producteur de blocs sur la blockchain publique EOS, les étudiants bénéficieront d’une année pour construire une plateforme numérique dotée de la base de données publique EOSIO. Il s’agit de la dernière génération de protocole à code source ouvert, qui facilite la gouvernance, la comptabilité et l’utilisation de la technologie blockchain et des contrats intelligents, lesquels assureront l'auditabilité et l'intégrité des opérations effectuées par les différentes fonctionnalités de la plateforme CryptoSys, dont ceux de comptabilité, gouvernance et gestion de l'actionnariat.
Proposition d’affaires à EOS Nation
Lors d’une fin de semaine pour les entreprises en démarrage organisée par la Faculté de génie, Justin Brûlotte, étudiant en génie informatique, rencontre Vincent Grenier, dirigeant principal des finances de EOS Nation et diplômé de l’UdeS en génie civil. Ils discutent de la cryptomonnaie, un sujet qui intéresse le futur ingénieur en informatique. Lorsque le temps de choisir son projet de fin de baccalauréat arrive, Justin cherche un bon défi technique. Il recontacte Vincent en lui faisant une proposition d’affaires et d’ingénierie qu’il ne pouvait refuser.
Le projet suscite également un si grand intérêt parmi les collègues de Justin au baccalauréat que 13 autres étudiants en génie informatique acceptent de se joindre à CryptoSys. « Sur le plan technique, nous devrons marier le côté classique Web et le développement informatique avec le côté innovant de la chaîne de blocs, et trouver un compromis pour que ça demeure harmonieux et réponde aux besoins des entreprises », explique Jean-François Bélisle, étudiant en génie informatique.
Supervisées par Vincent Grenier, l’un des sept cofondateurs de EOS Nation, les deux équipes de futurs ingénieurs apprendront à décentraliser les données, un paradigme différent des apprentissages en génie informatique, où ils apprennent habituellement à centraliser l’information. Ils devront apprendre à trouver l’équilibre entre la centralisation des données et leur décentralisation. Toute l’information ou toutes les transactions dont nous voulons conserver la trace peuvent être faites directement sur la chaîne de blocs publique ou peuvent être effectuées sur une base de données privée.
Par la suite, l'information de la transaction peut être hashée, et ce hash, transmis sur la chaîne de blocs publique afin d'assurer l'auditabilité de la transaction. Un hash cryptographique est une série de chiffres et lettres générée par une fonction de hash cryptographique. Cette série d’opérations mathématiques effectuées par un ordinateur permet d’associer un ensemble de données de n’importe quelle taille à une signature aléatoire. « C’est très stimulant de travailler avec des individus passionnés qui voient le potentiel de EOSIO. De plus, ils désirent investir leur temps et déployer leur expertise pour ajouter encore plus de valeur à la chaîne de blocs publique EOS », souligne fièrement Vincent Grenier.
Deux équipes, une bannière : CryptoSys
La première équipe de sept futurs ingénieurs concevra une application Web qui intègrera des fonctionnalités de gestion comptable et financière assurant la traçabilité et l’intégrité des transactions par l’entremise de la chaîne de blocs EOS. La seconde équipe de CryptoSys programmera des fonctionnalités de gouvernance et de gestion participative. « Ces outils essentiels permettront aux petites et moyennes entreprises de gérer leur société en utilisant la blockchain EOS, que ce soit pour les actions d’entreprise, les transferts au sein de la compagnie ou la modification des documents d’entreprise », fait valoir Jean-François Bélisle, étudiant en génie informatique.
Les sociétés sont habituellement encadrées par des statuts, des règlements administratifs et des conventions d’actionnaires. Habituellement, ces documents se présentent d’une manière archaïque sous forme de papier. « Nous proposons de faciliter la gestion de ces documents sous la forme d’une application Web qui pourra être jumelée à celle que l’équipe de Justin concevra », renchérit le futur ingénieur en informatique. CryptoSys est le fruit d’un mélange de logiciels de comptabilité et d’un compte de banque. Il permet l’extraction de toutes les données de la blockchain avec des fonctionnalités plus spécifiques comme le paiement des employés, à titre d’exemple. Denis Carrière, directeur de la technologie chez EOS Nation, et Vincent Grenier, superviseront le travail des étudiants sur une période d’un an. « Notre devise : faire du mentorat auprès de jeunes étudiants afin d’éliminer les barrières d’entrée sur cette chaîne de blocs publique pour que EOSIO soit accessible partout », annonce le président et directeur général de EOS Nation, Yves La Rose.
CryptoSys est le fruit d’un mélange de logiciels de comptabilité et d’un compte de banque. Il sera programmé un peu à la manière du site transactionnel AccèsD de Desjardins.
CryptoSys concevra une plateforme de services basée sur la technologie de la chaîne de blocs EOS qui permettra aux entreprises et aux individus de gérer leurs finances tout en facilitant la gouvernance de leur entreprise, et ce, à moindre coût, comparativement aux logiciels existants. Quant aux utilisateurs de la plateforme, ils pourront demeurer gardiens de leurs actifs numériques, ce qui enlève la nécessité d'utiliser les services d'une banque. Il sera programmé un peu à la manière du site transactionnel AccèsD de Desjardins. Les transactions avec les EOS seront répertoriées, tout comme l’utilisation des autres cryptomonnaies ou autres services. Les entreprises pourront dès lors effectuer un bilan financier comptable afin de produire un rapport d’impôt.
La chaîne de blocs, pour des bases de données sécurisées
Peu de gens connaissent l’existence des chaînes de bloc ou leur utilité. Développées par Stuart Haber et Scott Stornetta en 1991 pour instaurer un système afin que les documents horodatés ne puissent être trafiqués. Avec l’apparition du bitcoin, ce n’est pas avant octobre 2008 qu’une première application concrète a été déployée autour de cette chaîne de blocs. La chaîne de blocs publique est une base de données de stockage et de transmission d’information sans entité de contrôle. Les transactions envoyées sur un tel réseau sont validées par des validateurs de transactions à un intervalle de temps spécifique à la technologie utilisée, soit toutes les dix minutes pour bitcoin, et 0,5 seconde pour EOS, par exemple. C’est à l’intérieur de chaque bloc de la chaîne que se retrouve le hash de l’information de chaque transaction effectuée sur le réseau.
Lors d’une transaction, plusieurs types d’information sont enregistrés sur la chaîne, soit la date, l’heure, le montant de la transaction, les participants à la transaction, les frais de transaction ainsi que d’autre information plus technique. Une fois que le temps d’intervalle de validation d’un bloc est atteint, toute l’information du bloc, soit les hash de transactions, le hash du bloc précédent et le numéro du bloc actuel, sont hashés en un nouveau hash unique. C’est cette action de hashage qui lie cryptographiquement un nouveau bloc aux blocs précédents et assure l’auditabilité et l’immuabilité des données. Tant qu’il y a un consensus des validateurs du réseau sur l’état de la base de données, la base de données est sécuritaire et peut être utilisée comme système public de comptabilité à triple entrée.
Les possibilités offertes EOS
L’écosystème EOS est un système de comptabilité à triple entrée permettant l'utilisation de contrats intelligents. Actuellement, les petites et moyennes entreprises font appel aux systèmes de comptabilité en partie double (un compte débité et un compte crédité). En intégrant la blockchain publique, elles ajoutent une troisième entité, le réseau public, pour valider l’information et la rendre immuable. Lors d’une transaction, par exemple, un monsieur X conserve son reçu et une madame Y fait de même avec le sien. Chacune des parties possède une preuve de la transaction. Mais lorsque la transaction a été effectuée à l’aide d’une chaîne de blocs, il y a aussi un réseau public avec les transactions de toutes les entités qui participent. C’est un réseau immuable et décentralisé. Cette transaction ne peut donc pas être altérée, puisqu’elle est validée par un réseau décentralisé résistant aux attaques et à la censure.
Pionnière, Bitcoin s’est taillé une place sur le podium des cryptomonnaies en agissant selon plusieurs comme une valeur refuge pour les investisseurs. Limitée par sa performance, et sa technologie voulant rester un « or » numérique inflexible, elle ne peut pas répondre à plusieurs autres besoins nécessitant une technologie blockchain performante. EOS offre de nouvelles possibilités encore inexplorées. Ce ne sont plus que des transferts de cryptomonnaies, mais plutôt des opérations financières faisant appel à des contrats intelligents dans des applications comme CryptoSys, mais aussi des systèmes comme des jeux vidéo. Par exemple, vous pourriez louer une épée magique via la blockchain pendant que vous dormez la nuit. À une autre époque, les gens pirataient les serveurs des jeux, mais maintenant, avec la chaîne de blocs, c’est impossible, ce qui confère davantage de valeur aux actifs numériques.
Et le futur de la chaîne de bloc?
Qu’en est-il de notre identité numérique sur la blockchain? Elle sera en ligne très bientôt, que nous le voulions ou non. Des gouvernements s’y préparent activement, dont au Canada et aux États-Unis. Afin de bénéficier de tous les avantages de cette technologie et pour diminuer les coûts d'opérations de notre société, il est important d'instaurer un système d'identité numérique ainsi que des monnaies fiduciaires sur une blockchain, ce qui facilitera l'auditabilité des transactions et permettra d'automatiser certains processus. Les processus pouvant être automatisés comprennent, par exemple, le paiement des taxes et de l'impôt ou le versement d'intérêts sur une balance de fonds, ainsi que la collecte d'information nécessaire pour les autorités financières. « Nous pourrions éventuellement faire des transactions sur cette plateforme numérique non seulement pour valider la transaction que nous venons d’effectuer, mais aussi pour payer automatiquement l’impôt, la TPS et la TVQ. Ces différentes sommes d’argent numérique seraient automatiquement versées au gouvernement. Le commerçant n’aurait plus à le faire », commente Vincent Grenier.
Ainsi, chaque gouvernement deviendrait propriétaire de sa propre blockchain sur son propre réseau EOS ou autre technologie utilisée avec des identités numériques que le gouvernement contrôlerait. La Chine se prépare à être la première des superpuissances à adopter pleinement la technologie. Elle est sur le point de lancer sa plateforme nationale de blockchain, laquelle fait partie de sa grande stratégie pour diriger la transformation numérique de l'économie mondiale. Les gouvernements et entreprises auront accès à plusieurs technologies blockchain privées ainsi qu’à deux technologies blockchain publiques, EOS et Ethereum, une autre plateforme de contrats intelligents décentralisés utilisant un langage Turing complet. Quand la science-fiction devient de la « science action ».