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Créateurs et créatrices d’innovation

Pr Nadi Braidy : la science derrière les matériaux

Pr Nadi Braidy
Pr Nadi Braidy
Photo : fournie

Nadi Braidy est professeur titulaire et chercheur en génie chimique et biotechnologique de la Faculté de génie de l’Université de Sherbrooke. Il est titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la synthèse et la caractérisation de nanomatériaux multifonctionnels, ainsi que codirecteur des infrastructures du 3IT.

Formation 

2000 – Baccalauréat en génie à l’École Polytechnique de Montréal

2002 – Maîtrise en science et énergie des matériaux à l’INRS-Énergie, Matériaux et Télécommunications.

2007 – Doctorat en Science et ingénierie des matériaux à l’Université McMaster

2009 – Postdoctorat à l’Université Diderot et à l’Office nationale d’études en recherche aérospatiales

Année d’arrivée au 3IT: Depuis l’ouverture, en 2012

Quel est votre mandat actuel? 

Je fabrique des nanomatériaux et des nanopoudres par plasma. Il peut y avoir du plasma chaud ainsi que du plasma froid comme des néons ou des boules qui hérissent les cheveux. Nous utilisons le plasma chaud afin de fabriquer des nanomatériaux, et particulièrement des nanopoudres. Nous tentons de faire l’ingénierie de ces nanomatériaux à travers les paramètres du procédé afin de fabriquer des nanomatériaux avec des fonctions particulières.

Figure 1 - Légende complète au bas du texte
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Photo : fournie

La croissance de ces nanomatériaux se déroule dans des conditions contrôlées, comme des conditions de pression, de température, d’environnement réactif, etc. Ces temps-ci, nous les utilisons beaucoup pour la catalyse hétérogène. Un catalyseur, c’est un ingrédient d’une réaction chimique qui influence sa vitesse et, dans plusieurs cas, permet ainsi de l’exploiter par un procédé industriel.



En tant qu’ingénieur des matériaux, je m’intéresse à l’évolution du catalyseur pendant la réaction et au cours de celle-ci. L’efficacité du catalyseur est nécessairement tributaire des paramètres physico-chimiques et morphologiques des matériaux et ainsi, je m’intéresse à ce qui se passe du côté obscur de l’interface, celle du matériau.


Voilà la première partie de mon travail, qui se réalise plutôt au laboratoire des plasmas, localisé à la Faculté de génie. Au 3IT, nous effectuons la caractérisation, qui peut se faire de façon spectroscopique, microscopique, ou une combinaison des deux. Forcément, à un moment, il faut voir ce qu’on fait, et c’est là que la microscopie électronique entre en jeu. Elle nous permet d’alimenter ce cycle d’innovation, où il est alors possible de corriger le tir, puis de regarder à nouveau.

Prochainement, nous allons démarrer une plateforme 3IT.materiaux où seront logés les principaux instruments de microscopie électronique et de spectroscopie.

De plus, je suis directeur des infrastructures, avec le Pr Dominique Drouin. Notre rôle est de penser aux infrastructures du 3IT d’aujourd’hui et de demain. Nous travaillons à gérer cette croissance quasi exponentielle qu’a eu le 3ITdepuis sa création au niveau du personnel et des laboratoires.

Comment la philosophie du 3IT vous rejoint-elle? 

C’est particulièrement la philosophie des plateformes ouvertes qui m’interpelle.

Couper le lien entre un chercheur et “son” laboratoire attitré apporte son lot d'avantages. Les gens commencent à se parler et à réellement se concentrer sur la science et l’ingénierie. Cela génère des idées et cela permet de se concentrer à résoudre des problèmes concrets de la société à l’aide d’expertises multidisciplinaires.

Cette philosophie a été implantée dès la genèse du 3IT. La communauté évolue dans cet écosystème, puisque cela se fait de façon naturelle. Donc en arrivant au 3IT, un chercheur est déjà inondé d’idées provenant de collègues. Cette réalité lui permet de déployer ses ailes rapidement, et de s’investir dans quelque chose de concret et d’efficace pour la société.

Comment l’interdisciplinarité se manifeste-t-elle dans votre recherche scientifique? 

Mon domaine est le génie des matériaux, pour lequel il n’y a pas de département attitré. Je n’ai pas le choix d’être interdisciplinaire puisque les matériaux touchent le génie chimique, le génie civil, le génie mécanique, etc. En microscopie, c’est exactement la même chose, puisqu’il n’y a pas non plus de département de microscopie.

Figure 2 - Légende complète au bas du texte
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Photo : fournie

À travers la discipline des matériaux et de la microscopie j’intègre la multidisciplinarité. Si ça prend telle expertise avec telle ressources pour faire avancer le projet, alors nous la trouvons aisément parmi la communauté de l’UdeS et celle des collègues d’autres institutions. La structure du 3IT favorise ces liens et le travail interdisciplinaire.

À quand remonte la découverte de votre intérêt/passion pour la science? 

Lors de ma dernière année de baccalauréat. À la fin de mon baccalauréat, j’ignorais ce que je voulais faire. Oui, mon baccalauréat était axé vers l’ingénierie, mais davantage vers le côté scientifique et la recherche.

C’est un camarade qui m’a parlé des nanotechnologies, un domaine alors émergent. Par exemple, les nanotubes de carbone, on n’en entendait presque pas parler au début des années 2000. J’ai voulu essayer et voir ce que c’était.

Quand j’ai débuté ma maîtrise, j’ai été initié à la recherche. Je me suis tout de suite plu avec la méthodologie et la façon de faire. Et j’ai eu un coup de cœur : fabriquer des nanotubes de carbone.

Dans ce domaine, si tu ne vois pas d’images, tu n’y crois pas. Quand je zoomais de l’échelle des millimètres jusqu’à celle du nanomètre, avec un microscope électronique à transmission, j’avais l’impression de plonger dans un nouveau monde.

Comme en plongée sous-marine, il y a tant de beauté et la nature est tellement bien faite que nous rentrons dans un autre monde. En tant qu’amateur de science-fiction, quand je regarde dans un microscope, je me dis : "Non, ce n’est pas possible que les matériaux aient pu s’agencer de cette façon!” C’est un émerveillement chaque fois. Donc, ma passion pour la science est née lorsque j’ai regardé pour la première fois des nanotubes de carbone dans un microscope à transmission.

Quelle habitude vous caractérise en laboratoire, en tant que chercheur? 

Je dirais que c’est ma capacité à amener les gens à travailler ensemble. Oui, aussi la rigueur et l’esprit d’équipe, mais nous les avons tous un peu d’une certaine façon.

Je pense que la force motrice principale, c’est la passion pour la recherche, pour notre écosystème ici ainsi que pour notre université. C’est enthousiasmant. Lorsque je propose un projet, les gens sont motivés, et cette motivation fait boule de neige.

Quel « impact » désirez-vous générer en société à titre de chercheur? 

J’aimerais intéresser les jeunes à la recherche, leur faire découvrir le monde merveilleux, mais peu connu, de la microscopie.

J’ose aussi espérer que j’aurai un impact sur une technologie qui va maturer, puis créer une industrie, de la richesse et des emplois. Je souhaite que l’une des inventions développées ici se transforme en une entreprise stable, à succès, avec des employés motivés. Pour l’instant, je ne vois pas comment y arriver, mais c’est un objectif de carrière.

Figure 3 - Légende complète au bas du texte
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Photo : fournie

Je dirais aussi de mieux faire découvrir les matériaux et la science des matériaux aux ingénieurs et aux scientifiques, que ce soit à travers le développement de nouvelles activités pédagogiques ou, pourquoi pas, d’un nouveau programme. C’est une ambition que je me donne avant la fin de ma carrière!



Outre la science, possédez-vous une autre passion? 

J’adore la science-fiction, surtout les bandes-dessinées et les animés. Elles me permettent de découvrir de nouveaux mondes!

Légendes des figures

Figure 1. Mme Carbone : Une nanocorne de carbone est une des nanostructures composées uniquement d’atomes de carbone (points sombres sur l’image) et généralement agrégée par dizaines de manière à former des superstructures telles un oursin des mers à l’échelle nanométrique. Grâce à leurs fabuleuses propriétés, ces nanostructures sont au cœur de nombreuses recherches telles que la délivrance de médicaments, le stockage de méthane ou d’hydrogène, pour les batteries ou encore comme technologie pour la détection d’allergènes dans l’industrie agroalimentaire. Celle-ci a été produite dans un réacteur plasma thermique atteignant les 8000°C, une nouvelle méthode permettant d’en produire en grande quantité et de façon contrôlée. Trop petit pour être observé par microscope optique, nous avons eu recours à la microscopie électronique en transmission haute résolution. La microscopie électronique en transmission utilise en faisceau d’électrons accéléré dans notre cas à 80 kV pour sonder des nano-objets à l’échelle atomique.

Figure 2. Deux facettes d’une même tête. Ce sont des nanoparticules de 30-100 nm fabriquées par plasma thermique, à partir de précurseurs à base de fer et de silicium. À la manière du dieu grec Janus (et de la Force !), ces particules sont formées d’un côté sombre, l’oxyde de fer, et d’un côté clair, la silice. Nous considérons ces particules pour des matériaux bi-fonctionnels : l’oxyde de fer est magnétique et donc récupérable grâce à un aimant, tandis que la surface de la silice peut être éventuellement modifiée pour agir comme agent de dépollution.

Figure 3. Particules de ferrites de cuivre-nickel fabriquées décorées par des clusters de cuivre par plasmas. L’image de gauche, montre une image de microscopie électronique en transmission en mode balayage, tandis que l’image de droite montre la répartition du cuivre en rouge et de la ferrite de cuivre-nickel la soutenant, en vert. Un spectromètre permet d’analyser l’énergie que les électrons ont perdu en parcourant l’échantillon et d’en déduire précisément sa composition et sa nature chimique en chaque point analysé, permettant ainsi d’identifier les nanomatériaux à l’échelle atomique. Cette analyse a permis de confirmer la nature chimique du cuivre et sa distribution dans le matériau. En utilisant des méthodes de synthèse classique, il est très difficile de déposer le cuivre sur des ferrites. Or grâce aux plasma, il a été possible de réaliser cette structure en une seule étape. La caractérisation par microscopie électronique est essentielle pour comprendre pourquoi ces particules étaient particulièrement actives dans un procédé de catalyse hétérogène d’amination d’alcool, un procédé standard utilisé dans l’industrie chimique. Crédit : Nicolas Dumaresq, Université de Sherbrooke, en collaboration avec Pr Audrey Moores (Chimie, McGill). Davantage d’informations sont disponibles ici:  : https://chemistry-europe.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1002/cctc.201900592. Cliquez ou appuyez si vous faites confiance à ce lien." href="https://can01.safelinks.protection.outlook.com/?url=https://chemistry-europe.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1002/cctc.201900592&data=05|01|Stephanie.Bisson4@USherbrooke.ca|339b754b5d204ceddf6108dab6935b08|3a5a8744593545f99423b32c3a5de082|0|0|638023041246800110|Unknown|TWFpbGZsb3d8eyJWIjoiMC4wLjAwMDAiLCJQIjoiV2luMzIiLCJBTiI6Ik1haWwiLCJXVCI6Mn0=|3000|||&sdata=yGCoNDm7v05yzUkRX7G3ebOhykVcPsDtQcEMR2OUmqo=&reserved=0" target="_blank" data-auth="Verified" data-linkindex="0" data-mce-href="https://can01.safelinks.protection.outlook.com/?url=https://chemistry-europe.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1002/cctc.201900592&data=05|01|Stephanie.Bisson4@USherbrooke.ca|339b754b5d204ceddf6108dab6935b08|3a5a8744593545f99423b32c3a5de082|0|0|638023041246800110|Unknown|TWFpbGZsb3d8eyJWIjoiMC4wLjAwMDAiLCJQIjoiV2luMzIiLCJBTiI6Ik1haWwiLCJXVCI6Mn0=|3000|||&sdata=yGCoNDm7v05yzUkRX7G3ebOhykVcPsDtQcEMR2OUmqo=&reserved=0">https://chemistry-europe.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1002/cctc.201900592



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