Mois des semiconducteurs
Faire passer l’innovation responsable d’une promesse peu engageante à une réalité
À l'occasion du Mois des semiconducteurs, nous mettons en lumière un vaste projet de recherche interdisciplinaire mené par la professeure Marie-Luc Arpin de l'École de gestion, appuyée par le professeur Serge Ecoffey de la Faculté de génie, tous les deux membres du 3IT. Ce duo travaille au coeur de la zone d'innovation Technum Québec afin de réfléchir à l'impact du développement des technologies dans une perspective d'innovation responsable.
À propos du projet
Lancé à l'automne 2023, le projet SoZI (pour dynamiques sociales des zones d'innovation) vise à ce que les acteurs de l’innovation s’approprient des pratiques d’anticipation sociale qui sont inclusives, réflexives et réactives. Il est financé par le Fonds de recherche du Québec, en partenariat avec le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie.
Le projet implique plusieurs partenaires, dont l'Industrie des systèmes électroniques du Québec (ISEQ), le Centre de Collaboration Micro Innovation (C2MI), IBM, la Ville de Bromont, le Cégep de Granby et la Société de développement économique de Bromont (SODEB). En plus, une quinzaine de chercheuses et chercheurs multidisciplinaires, provenant de l'Université de Sherbrooke et d'autres universités, prennent part à la démarche.
Quelles sont les étapes des projets?
Le projet est constitué de trois grandes étapes :
- Diagnostic multidimensionnel – Grâce à une grille de lecture informée par l’état des savoirs sur les dynamiques sociales des sciences et technologies, le projet porte un diagnostic multidimensionnel et en continu sur les principaux points de tension associés à la zone d’innovation.
- Espaces d’échanges inclusifs et réflexifs – En concertation avec les acteurs de la zone, le projet développe des espaces d’échanges inclusifs et réflexifs. Ceux-ci favorisent une révision appropriée des attentes et promesses des différentes parties sur les principaux points de tension identifiés.
- Outils pour la zone d’innovation – Le projet outille la zone afin d'inscrire l’innovation responsable dans la durée. Les acteurs sont amenés à prendre en main les processus de diagnostic, d’échanges et de révision des attentes et promesses.
Quels sont les travaux en cours?
Nous avons plusieurs chantiers de recherche en cours qui visent à développer un diagnostic multidimensionnel sur la zone d’innovation Technum. Nos chercheuses et chercheurs examinent présentement :
- la trajectoire historique de développement de la zone;
- les impacts environnementaux des technologies numériques (déchets, eau, énergie) à différentes échelles;
- les tensions entre usages du territoire à l’échelle locale (infrastructures municipales, impacts sur le logement);
- les tensions entre les représentations sociales de l’innovation en microélectronique (visions de l’avenir, par exemple en lien avec le développement économique et son intégration dans les chaînes logistique en Amérique du Nord).
Plus précisément, nous scrutons les archives de la Ville de Bromont, les publications Facebook de la population, les articles de presse et nous échangeons avec les gestionnaires et dirigeants des organisations et entreprises impliquées dans le développement de la zone.
En plus de ces chantiers de recherche, nous développons également, en partenariat avec le Cégep de Granby, des pilotes de formation pour sensibiliser les futures personnes employées de la zone à développer des réflexes de responsabilité lorsqu’elles participent à des activités d’innovation en entreprise.
Quel est l’impact escompté du projet?
L’objectif de mobilisation des connaissances du projet est que les écosystèmes qui font vivre les zones d’innovation au Québec incarnent et diffusent les principes de l’innovation responsable.
Cet objectif implique que la démocratisation des connaissances dans notre initiative passe par les individus et organisations partenaires du projet. Ceux-ci deviendront eux-mêmes des agents de démocratisation de l’innovation responsable et donc des acteurs de transformation sociale. Il faut reconnaître qu’une partie de ce rayonnement se fera de façon non planifiée.
En effet, notre initiative regroupe des acteurs avec des profils diversifiés et des réseaux relativement distincts. Ces acteurs diffuseront donc spontanément leur expérience de l’innovation responsable dans divers milieux que nous ne pouvons qu’entrevoir en ce moment.
Qu'est-ce que l'innovation responsable?
L’innovation responsable est définie comme l’ensemble des pratiques managériales et des routines organisationnelles visant à « prendre soin » de l’avenir. Elle est caractérisée par une orientation vers une gouvernance de la science et de l’innovation technologique qui se veut anticipatrice, inclusive, réflexive et réactive/réceptive.
À ces quatre dimensions maintenant canoniques de l’innovation responsable s’ajoute, particulièrement dans le contexte des entreprises, la gestion des connaissances.
- L’anticipation cherche à déterminer ce qui est connu, ce qui est probable, ce qui est plausible et ce qui est possible. L’innovation responsable encourage une pratique anticipatoire qui permet à des imaginaires concurrents d’offrir des réponses à la question « u’est-ce qui se passerait si? ».
- L’inclusion ouvre les portes de la délibération à un large éventail d’acteurs sociaux en amont des projets d’innovation de l’ensemble des parties prenantes, et implique la reconnaissance et le nivellement des rapports de force asymétriques.
- La réflexivité pose un miroir devant les acteurs de l’innovation et les incite à prendre conscience des dynamiques sociales et des postures individuelles qui influencent leurs pratiques (jeux de pouvoir, intérêts, normes, attentes, etc.).
- La réactivité/réceptivité suppose l’ouverture au changement face aux préoccupations collectives et aux nouvelles connaissances, toujours en évolution. L’innovation responsable répond à ce qui émerge des processus d’anticipation, d’inclusion et de réflexivité. Cette rétroaction collectée en continu permet d’ajuster les orientations prévues de l’innovation responsable.
- La gestion des connaissances relève des processus mis en place pour favoriser l’homogénéité des connaissances au sein d’une organisation, de sorte que chaque membre dispose de l’ensemble des savoirs pertinents, mais concerne aussi les apprentissages faits avec des acteurs externes à l’organisation.
Membres de l'équipe de recherche provenant de l'Université de Sherbrooke :
- François Claveau : philosophie et éthique appliquée, Université de Sherbrooke
- Mathieu Gagnon : approches éducatives, épistémologie de l’enseignement, dialogue philosophique, Université de Sherbrooke
- Valérie Grandbois : entrepreneuriat technologique, Université de Sherbrooke
- Amélie Richard : enseignement, Université de Sherbrooke
- Céline Verchère : sociologie des technologies, innovation responsable, Université de Sherbrooke (3IT et LN2)
Membres de l'équipe de recherche provenant d'autres établissements :
- Guillaume Beaumier : politiques et études internationales, ENAP
- Cédric Brunelle : économie régionale, grappes industrielles, Centre INRS
- Jean-François Dubé : pensée critique, communauté de recherche philosophique, Cégep de Granby
- Mathieu Gagnon : enseignement et apprentissage, Université Laval
- Mahdi Khelfaoui : histoire économique et industrielle, grappes industrielles, politiques québécoises en matière d’innovation technologique, UQTR
- Florence Millerand : communication sociale et politique, usages sociaux du numériques, UQAM
- Morgan Mouton : études urbaines, flux de matières et d’énergie, métabolisme urbain, infrastructures numériques, INRS
- Stéphane Paquin : économie politique internationale, politique internationale du Canada et du Québec, analyse des politiques publiques, ENAP