66 professeurs et chargés de cours déposent un mémoire à l'Assemblée nationale contre le projet de loi 60
Ce mémoire est présenté par un collectif de professeur-e-s et chargé-e-s de cours de l’Université de Sherbrooke. Il s’appuie sur les recherches les plus récentes en droit, en sociologie des religions, en science politique et en études des relations ethniques.
En première partie, le mémoire soutient que le projet de loi 60 s’inscrit en rupture avec une tradition laïque qui, tant à l’international qu’au Québec et au Canada, reconnaît le principe de la liberté de conscience et de religion comme la finalité des aménagements laïques dans les démocraties libérales. Le mémoire regrette l’absence de neutralité d’une posture étatique visant à interdire le port de certains symboles religieux aux agents et collaborateurs de l’État, celle-ci révélant en effet une forme de pression du groupe majoritaire qui n’accepte l’expression de la diversité dans l’espace public que si elle se conforme à la conception du bien qui prédomine dans la société. Le mémoire en dénonce les effets en terme d’atteinte à la liberté de conscience et de religion garantie par les chartes canadienne et québécoise des droits et libertés.
En deuxième partie, le mémoire montre comment le projet de loi 60 se situe en porte-à-faux avec les standards normatifs universels que constituent les droits fondamentaux de la personne. Le mémoire soutient que les droits fondamentaux, auxquels le projet de « Charte des valeurs de la laïcité » porte incontestablement atteinte, ne peuvent être relégués au rang de simples valeurs nationales et regrette autant leur relativisation par le projet de loi 60 que leur instrumentalisation à des fins politiques. Le mémoire argumente que ce faisant, le projet de loi 60 se situe en rupture avec l’avancée des États de droit modernes.
En troisième partie, le mémoire dénonce la rupture sociale et les effets négatifs que le projet de loi 60 engendrerait s’il venait à être adopté. Le mémoire rappelle les difficultés, tant symboliques que pratiques, auxquelles font face les immigrants pour leur intégration sociale et professionnelle quand ils arrivent au Québec. Il souligne en particulier la montée des comportements racistes et islamophobes auxquels sont confrontés les immigrants de confession musulmane depuis près d’une dizaine d’années. Le mémoire argumente alors que, se plaçant en rupture avec un modèle interculturaliste d’intégration propre au Québec, le projet de loi 60 ouvre la voie à de nombreuses conséquences sociales négatives : exclusion, renforcement des préjugés et de l’islamophobie, replis communautaires, processus de radicalisations religieuses.