Programme des chaires d’excellence en recherche du Canada
L'UdeS lance deux des plus ambitieux programmes de recherche de son histoire
C’est une nouvelle qui n’a rien de banal : l’Université de Sherbrooke s’est qualifiée deux fois plutôt qu’une au très réputé Programme des chaires d’excellence en recherche du Canada grâce à d’ambitieux projets de recherche en sciences quantiques et en chimie verte/matériaux durables.
Après un long processus de sélection réparti en trois phases auquel ont participé plusieurs universités canadiennes, l’UdeS obtient non pas une, mais deux chaires d’excellence en recherche du Canada sur une possibilité de 34, une première pour l’établissement.
C’est la deuxième fois dans toute son histoire que l’Université de Sherbrooke obtient ce type de chaire.
Le Programme des chaires d’excellence en recherche du Canada finance les travaux les plus prometteurs au pays et offre l’une des sources de financement les plus convoitées par les universités canadiennes. L’obtention de deux chaires d’excellence confirme que l’UdeS compte parmi les universités de recherche les plus dynamiques au pays.
Pierre Cossette, recteur
En 2010, l’UdeS avait décroché sa première chaire d’excellence en recherche du Canada pour un programme prometteur en sciences quantiques. Cette chaire dirigée par le physicien Bertrand Reulet avait contribué à renforcer le positionnement de l’UdeS en informatique quantique, un secteur d’une grande importance stratégique pour le Québec et le Canada.
Cette fois, les ambitieux programmes de recherche de l’UdeS seront dirigés par deux sommités provenant de l’extérieur, soit le chimiste néo-écossais Leonard MacGillivray, qui travaille présentement aux États-Unis, et la physicienne espagnole Maia Vergniory, présentement à l’œuvre en Allemagne.
Les Chaires d’excellence en recherche du Canada ont pour but de permettre aux établissements de recruter des spécialistes éminents à l’international, ce qui leur donne la possibilité de réunir en leurs murs l’élite qui fera progresser substantiellement un domaine jugé prioritaire par le gouvernement canadien.
Tant dans le domaine des sciences quantiques que dans celui de la chimie verte et des matériaux durables, nous avions déjà le talent et les infrastructures de pointe nous permettant de pousser encore plus loin les connaissances scientifiques pouvant mener à des innovations en matière d’énergies renouvelables, de technologies vertes, de médecine de précision et de pharmacologie. Le recrutement de la professeure Vergniory et du professeur MacGillivray vient consolider notre posture déjà très solide.
Jean-Pierre Perreault, vice-recteur à la recherche et aux études supérieures
Les montants reçus pour conduire ces programmes de recherche seront répartis sur 8 ans et totalisent 8 M$ pour le professeur Leonard MacGillivray et 4 M$ pour la professeure Maia Vergniory.
Une nouvelle branche de la chimie quantique
Professeure Maia Vergniory
Titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada en matière quantique topologique
Faculté des sciences
À l'aube du XXIe siècle, notre dépendance à l'égard des technologies à base de silicium, comme le téléphone cellulaire, se heurte à des barrières physiques intrinsèques. En particulier, la taille des atomes impose une contrainte à la miniaturisation des appareils, une solution pourtant indispensable à la réduction de nos besoins en énergie.
Dans l’espoir de contribuer au développement d'une technologie plus durable, la physicienne et spécialiste en science des matériaux Maia Vergniory propose de créer une nouvelle branche de la chimie quantique topologique qui prend en compte les interactions fortes entre les électrons.
Pour ce faire, elle s’intéresse aux propriétés fascinantes des matériaux topologiques : « Les matériaux topologiques sont des matériaux qui transgressent la classification classique de la matière, poursuit-elle. Ils possèdent des propriétés isolantes au centre et des propriétés conductrices à l’extérieur. Puisqu’on peut contrôler et quantifier le flux électrique circulant à leur surface, cela en fait d’excellents candidats pour diverses applications. »
La chercheuse travaillera aussi avec des métamatériaux, soit des matériaux composés de structures périodiques autres que des atomes, telles que des barres diélectriques ou des systèmes acoustiques. Hautement interdisciplinaire, le programme de recherche se situe au carrefour de la physique, de la chimie et de l'informatique.
C’est très excitant parce qu’on se trouve à la limite des connaissances, reconnaît la chercheuse. De nombreuses questions restent donc ouvertes, et nous n’avons aucune idée de la réponse qui sera apportée.
Aidée d’une équipe composée d’une douzaine d’étudiantes et d’étudiants à la recherche, la chercheuse mènera ses travaux – essentiellement des simulations – à l’Institut quantique de l’Université de Sherbrooke. La chaire permettra donc de mettre au point de nombreux dispositifs basés sur de nouvelles technologies quantiques, contribuant aux domaines des matériaux quantiques et de l’informatique quantique.
L’Institut quantique entretient des liens très innovants avec l’industrie et il est très bien positionné dans le monde; j’ai très hâte d’en faire partie. C’est sans compter l’environnement scientifique au Canada qui est florissant. C’est très motivant.
La professeure Maia Vergniory travaille présentement au Max Planck Institute for the Chemical Physics of Solid, en Allemagne. Son entrée en fonction à l’UdeS est prévue à l’été 2024.
Une carrière jeune, mais d’une grande densité
Quatorze ans : c’est tout le temps dont a eu besoin Maia Vergniory, entre l’obtention de son doctorat et aujourd’hui, pour devenir leader mondiale dans le domaine de la science des matériaux.
L’aventure commence en Espagne, son pays natal, alors qu’elle entame des études universitaires en physique, une matière avec laquelle elle a toujours eu de la facilité. C’était en 1998.
Elle fait ses études universitaires à l'Université Joseph Fourier de Grenoble, puis elle retourne à l'Université du Pays basque pour poursuivre un doctorat en physique, qu'elle obtient en 2008.
Depuis, Maia Vergniory accumule les réalisations remarquables. Elle se distingue notamment par la création d’un nouveau champ de recherche dans un domaine qu’elle a cocréé, celui de la chimie topologique quantique. Trois de ses articles scientifiques cumulent près de 600 citations, et ses travaux ont fait deux fois la couverture de la prestigieuse revue scientifique Nature.
En 2021, la professeure Vergniory se joint au réputé Max Planck Institute for the Chemical Physics of Solid, en Allemagne, pour avancer ses recherches portant sur la prédiction de nouvelles phases topologiques dans les matériaux électroniques et magnétiques.
D’importantes reconnaissances soulignent son apport à la science au cours de sa jeune carrière, dont le prix L'Oréal-UNESCO pour les femmes et la science, en 2017. Plus récemment, en 2022, elle est nommée membre de l’American Physical Society.
Stockage d’énergie solaire, pharmacologie et semi-conducteurs organiques
Professeur Leonard R. MacGillivray
Titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada en ingénierie des cristaux pour la chimie verte et les matériaux durables
Département de chimie, Faculté des sciences
Les travaux interdisciplinaires du professeur MacGillivray portent sur les molécules cristallisées, une discipline récente de la chimie ayant des ramifications en chimie verte, en chimie pharmaceutique et en science des matériaux
« Mes recherches s’inscrivent dans un domaine appelé l’ingénierie des cristaux, qui vise à contrôler les structures des cristaux moléculaires, explique le chercheur. Il existe de nombreuses applications potentielles, de la chimie organique synthétique à la médecine, mais aussi dans le contexte de la résolution des problèmes liés aux changements climatiques et au stockage d’énergie. »
Dans son laboratoire du Département de chimie, il travaillera avec une équipe d’environ 10 personnes étudiantes et postdoctorantes. « Nous tenterons de prédire les propriétés des molécules à l’état solide qui se cristallisent, pour ensuite modifier leurs propriétés, telles que la solubilité, la biodisponibilité, la porosité et les propriétés catalytiques, en vue de les appliquer pour des utilisations commerciales entourant les technologies de demain.»
Un deuxième laboratoire sera aménagé pour ses travaux, cette fois à l’Institut de pharmacologie de Sherbrooke (IPS), « un institut de renommée mondiale et unique en son genre », au dire du professeur MacGillivray. Avec une autre équipe d’environ 10 personnes étudiantes et postdoctorantes, il se penchera sur les cocristaux pharmaceutiques, une trajectoire novatrice pour la création de nouveaux médicaments. « Chaque petite molécule en cours de développement à l’IPS et au Canada pourrait être convertie en cocristal pharmaceutique, ce qui donnerait naissance à des entreprises en démarrage et à de nombreuses perspectives intéressantes. »
Le chercheur de renom travaillera également avec des groupes de la Faculté de génie pour développer de nouveaux dispositifs utilisant les principes de l’ingénierie cristalline. « Un autre projet de la chaire porte sur ce qu’on appelle le "stockage moléculaire de l'énergie solaire thermique" ou "matériaux MOST". Imaginez une énergie solaire portable stockée qui peut ensuite être convertie en chaleur ». Un quatrième volet sera axé sur le développement de semi-conducteurs organiques, pouvant donner lieu à des matériaux flexibles. « Les applications potentielles comprennent le papier électronique et les vêtements intelligents. Nous cherchons également à accélérer la conception de matériaux cristallins en utilisant notre expertise en matière d'approches computationnelles. »
Le professeur Leonard MacGillivray travaille présentement à l’Université de l’Iowa, aux États-Unis. Son entrée en fonction à l’UdeS est prévue à l’hiver 2024.
Une impressionnante feuille de route
Originaire de Sydney, sur l’île du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, Leonard MacGillivray se découvre une passion pour la recherche alors qu’il commence à peine ses études de premier cycle à l’Université Saint-Mary’s, à Halifax.
En 1994, l’étudiant de première génération décroche une « bourse scientifique 1967 » du Natural Sciences and Engineering Research Council, qui lui permet de poursuivre son apprentissage à l’établissement de son choix. Il opte pour l’Université du Missouri-Columbia, où il obtient son doctorat en chimie en 1998. Il revient ensuite au Canada pour mener des recherches indépendantes à l’Institut Steacie des sciences moléculaires du Conseil national de recherche du Canada, à Ottawa.
C’est en 2000 qu’il devient professeur à l’Université de l’Iowa, où il prend la direction du Département de chimie, de 2019 à 2023.
Le professeur MacGillivray est l’auteur de plus de 255 publications scientifiques, il détient 7 brevets et a donné plus de 210 séminaires nationaux et internationaux dans plus de 22 pays. Il a formé et encadré 30 étudiantes et étudiants au doctorat et se dit très « enthousiaste à l’idée d’en former d’autres. »
Parmi les nombreuses reconnaissances qu’il a reçues tout au long de sa carrière, notons le ACS Midwest Award (2021) et le Arthur C. Cope Scholar Award (2007), tous deux de l'American Chemical Society. Le chercheur est également membre de la Royal Society of Chemistry, de l’American Association for the Advancement of Science ainsi que de l'American Chemical Society.