Apprendre à intervenir en situation d’urgence
Pleins feux sur les simulations à grand déploiement en sciences infirmières
Catastrophe! Un incident est survenu, et une trentaine de personnes blessées font irruption à l'urgence. Comment réagir? Quelles sont les priorités? Avec qui collaborer pour prodiguer les soins essentiels?
On a beau enseigner les rudiments des interventions en urgence, il n'y a rien comme de le vivre. C'est pour cette raison que l'équipe de l'École des sciences infirmières multiplie les occasions d'apprentissage dans des contextes se rapprochant le plus possible de la réalité pour permettre aux étudiantes et aux étudiants de plonger dans le feu de l'action et de développer les compétences nécessaires à ce genre de situations.
Des simulations plus vraies que nature
Maquillage de victimes avec du faux sang. Embauche de comédiens et de comédiennes pour jouer un rôle précis. Un bébé qui pleure. Des cris de panique qui retentissent aux quatre coins du corridor.
La scène semble tout droit sortie d'un plateau de tournage à Hollywood. Pourtant, nous sommes au Laboratoire de simulation clinique (LSC) de la Faculté de médecine et des sciences de la santé (FMSS). L'équipe en place a tout prévu pour rendre la simulation aussi réelle que possible.
Aucun problème à se laisser prendre au jeu tellement le sentiment d'urgence se fait sentir. Une expérience comme celle-là n'a pas son pareil pour bien préparer les étudiantes et les étudiants à la survenue de situations du genre dans la vraie vie.
Désastre lié à une urgence climatique : une simulation d'actualité
Les thèmes des simulations sont aussi liés à des enjeux actuels. Par exemple, la professeure Isabelle Ledoux, directrice du développement pédagogique et professionnel de l'École des sciences infirmières, organise l'activité Simulation interprofessionnelle à grand déploiement d'un désastre externe lié à des urgences climatiques. Une trentaine de personnes étudiantes issues des programmes de médecine et de sciences infirmières participent à cette simulation, qui reproduit un épisode de feu de forêt et de canicule intense.
La scène se déroule au LSC, transformé pour l'occasion en école primaire qui tient lieu de centre d'urgence. On y trouve des chaises et des lits de camp prêtés par l'armée, ainsi que des dessins réalisés par des élèves de l'école Hélène-Boullé pour représenter de manière réaliste un lieu scolaire. On y voit des personnes en détresse respiratoire, en panique, confuses et présentant divers types de maux et de blessures.
Les étudiantes et les étudiants sont ainsi appelés à assurer les évaluations et les soins requis par l'état physique, mental ou psychosocial des personnes soignées, et à intervenir de manière à favoriser la collaboration interdisciplinaire en mettant à profit la coordination d'équipe, le leadership et la communication.
Même les objectifs de développement durable sont pris en considération. Le recyclage et la récupération ont été préconisés dans toutes les étapes de la préparation de l'activité.
Ce type d'activité s'inspire d'une simulation organisée en Alberta. À ma connaissance, c'est la première fois qu'une simulation d'une telle ampleur est recréée ici au Québec. Elle se caractérise par son aspect interprofessionnel. C'est très rare qu'une aussi grande équipe soit mise à contribution dans une telle organisation, et c'est ce qui fait la force de la simulation. Des membres du corps professoral, des personnes facilitatrices, des techniciens et techniciennes en travaux pratiques ainsi que des personnes étudiantes du programme de doctorat en médecine mettent tout en œuvre pour rendre l'expérience aussi vraie que possible.
Professeure Isabelle Ledoux, directrice du développement pédagogique et professionnel de l'École des sciences infirmières
Code orange : arrivée massive de personnes blessées après un carambolage
La professeure Mélanie Marceau, de son côté, organise tous les ans la simulation « code orange », qui met en scène un accident de la route et dont le réalisme est à couper le souffle. Les patientes et patients standardisés sont de fidèles habitués qui acceptent de se prêter au jeu. Bras coupé, œil endommagé, brûlure et perte de conscience sont au menu.
Une telle simulation nécessite environ six mois de préparation et implique plusieurs partenaires. Le code orange s'adresse aux personnes étudiantes de première année du DEC-bac en sciences infirmières et aux personnes étudiantes de troisième année du baccalauréat formation initiale qui choisissent le volet « soins critiques ». Elles sont une centaine à avoir le privilège de participer à cette simulation d'envergure, que ce soit au Campus de la santé de Sherbrooke ou au Campus de Longueuil.
Dans une première activité, les étudiantes et les étudiants effectuent le triage et discutent des enjeux liés à l'arrivée massive de personnes blessées. Une deuxième activité implique également les résidentes et résidents en médecine d'urgence. Ensemble, ils doivent collaborer et gérer l'arrivée des personnes blessées qui sont par la suite installées dans une zone rouge, jaune ou verte. Intubation, installation d'un drain thoracique, mise en place d'une intraosseuse et soins de plaies sont au nombre des tâches qu'ils effectuent en collaboration avec le personnel facilitateur en place.
À ma connaissance, l'Université de Sherbrooke est la seule université à intégrer la simulation code orange dans le programme de formation. On le fait parce qu'on y croit, on croit à l'importance de former nos futurs professionnels de la santé dans des contextes aussi près que possible de la réalité. Plusieurs sont confrontés à des émotions intenses. Il faut savoir aussi que les simulations sont toujours suivies d'un debriefing afin de revenir sur ce qu'ils ont vécu et en tirer des apprentissages.
Mélanie Marceau, professeure à l'École des sciences infirmières
Ici encore, toute une équipe s'affaire au bon fonctionnement de la simulation : des patientes et des patients standardisés et des étudiantes paramédicales du Programme de simulation humaine et de participation citoyenne (PSHPC), des techniciennes et techniciens du LSC qui animent les mannequins, des commis aux activités complexes de l'École des sciences infirmières (ÉSI), des personnes tutrices et professeures, sans oublier les personnes résidentes en médecine d'urgence ou en médecine de famille qui jouent leur vrai rôle.
Marie-Andrée Gareau, chargée de cours et étudiante à la maîtrise en sciences infirmières, cheminement en interventions infirmières, renchérit sur la pertinence des activités de simulation au sein de la formation : « Parce que les désastres externes ou les accidents à grande envergure n'arrivent pas souvent, il faut faire des simulations pour préparer le personnel soignant. Ce n'est pas comme un arrêt cardiaque qu'on vit plus souvent à l'urgence. Si on ne prépare pas adéquatement nos étudiantes et nos étudiants, il y aura plus d'impacts chez les patients. On vivra peut-être plus de chaos, de mortalité. Ce qu'on veut, c'est que le personnel infirmier soit prêt à affronter ce genre de situations. »
Camille Piché, étudiante au baccalauréat en sciences infirmières, avoue que la simulation a été à la hauteur de ses attentes : « J'aime ces simulations parce qu'on peut appliquer la matière théorique en pratique. J'ai pu développer mon leadership et apprendre comment intervenir rapidement pour stabiliser un patient. J'ai aussi constaté que je fonctionnais mieux sous l'adrénaline. C'est tellement réel. Vivre une expérience comme celle-là, ça nous prépare à la vraie vie. »
Ces simulations à grand déploiement s'ajoutent aussi à toutes les autres activités de simulation mises en place au Laboratoire de simulation clinique de la Faculté de médecine et des sciences de la santé. En collaboration avec le CIUSSS de l'Estrie – CHUS, des activités de simulations in situ sont également organisées pour assurer le développement sur le plan clinique des professionnelles et professionnels de la santé en exercice.
Joindre la pratique à la théorie n'aura jamais été aussi captivant et formateur pour les étudiantes et les étudiants en sciences infirmières!
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