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La publication électronique en sciences humaines et sociales (vol. 1, n° 1, 2009)

Le lancement de la revue électronique Mémoires du livre est l'occasion, dans un mouvement réflexif, d'établir un état des lieux, tant rétrospectif que prospectif, sur la publication électronique en sciences humaines et sociales. L'émergence de l'édition électronique1 durant la dernière décennie a donné lieu à des débats passionnants, mêlant arguments scientifiques, politiques, économiques, voire idéologiques2. Des concepts spécifiques ont vu le jour; un lexique partagé par les chercheurs s'intéressant au domaine s'est progressivement imposé (archives ouvertes, collecte des méta-données, pre-print, post-print, portail de revues, rétro-archivage, barrière temporelle flottante, etc.). Dans les faits, à l'heure actuelle, une très grande majorité de revues sont passées ou vont passer à une version électronique, ce qui n'exclut pas nécessairement la version papier. Bref, la révolution électronique pour la publication en sciences humaines a eu lieu. Il importe donc de l'acter, d'en écrire l'histoire, d'en observer les effets et de tenter d'en mesurer les conséquences à plus long terme. Ce numéro thématique voudrait ainsi explorer différents sujets suggérés ci-après, répartis selon leur perspective chronologique : un bilan historique, un constat contemporain et des visées prospectives.

Une analyse rhétorique des nombreux discours sur la publication électronique en sciences humaines et sociales, ainsi qu'une typologie des arguments employés, permettraient de mieux cerner les enjeux de cette nouvelle pratique. Il serait également utile de dresser un historique des évolutions de la technique et des standards, des initiatives et des projets inaboutis, de même que des logiques concurrentes dans le déploiement des solutions électroniques.

Dans l'optique d'un constat contemporain, un bilan des ressources actuelles permettrait de faire le point sur les stratégies de passage au numérique. Il faudrait aussi s'interroger sur les coûts réels du passage au numérique et sur les modèles économiques développés pour y faire face. En plus de l'inscription sociale du chercheur (entre autres par le biais de blogues) et des « usages non-contrôlés des publications scientifiques » (par exemple dans des forums)3, quels impacts amène la disponibilité du savoir élargie à un plus vaste public? En ce qui a trait à la dimension juridique, quels sont les avantages et désavantages des nouvelles licences, les Creative Commons, qui ont vu le jour pour faciliter la publication et la diffusion de tout contenu numérique?

Les visées prospectives, la partie la plus délicate de ce dossier, suscitent plusieurs pistes à étudier : la revue s'avère le type de publication qui a le mieux négocié son passage au numérique, mais est-il nécessairement le seul? Si l'article est désormais le vecteur de diffusion mis de l'avant en recherche, le développement des appareils de lecture numérique (e-books) modifiera-t-il cette donne en offrant au livre en sciences humaines une seconde jeunesse? Verra-t-on l'émergence d'autres formes nées des possibilités inédites du numérique? Bref, la publication électronique en sciences humaines et sociales, si elle ne peut plus être ignorée, n'en est encore qu'à ses balbutiements.

La publication électronique en sciences humaines et sociales, placé sous la direction de Björn-Olav Dozo (Université de Liège) et Karine Vachon (Université de Sherbrooke), est en ligne à l'adresse suivante : http://www.erudit.org/revue/memoires/2009/v1/n1/index.html


1 Gérard BOISMENU et Guylaine BEAUDRY, Le nouveau monde numérique : le cas des revues universitaires. Montréal, PUM, coll. « Champ libre », 2002, 178 p.

2 La Scholarly Electronic Publishing Bibliography (http://www.digital-scholarship.org/sepb/) recense et sélectionne les documents en anglais utiles à la compréhension des efforts de publication savante électronique sur Internet.

3 Pierre MOUNIER, « L'édition en ligne : un nouvel eldorado? », Blogo Numericus, 22/05/2008, consulté le 25 mai 2008.