L’anxiété en situation de choix de carrière à l’adolescence

Confrontées à l’augmentation de l’anxiété chez les élèves du secondaire et à ses effets délétères, les personnes conseillères d’orientation en milieu scolaire sont appelées à revoir leurs interventions. La doctorante en éducation Audrey Dupuis répond à une problématique importante : l’anxiété en situation de choix de carrière à l’adolescence. Sa thèse propose un programme d’intervention novateur et est à l’origine du nouveau volet Orientation au Programme HORS-PISTE du Centre RBC d’expertise universitaire en santé mentale de l’Université de Sherbrooke.

L’intervention groupale pour la prévention de l’anxiété a fait ses preuves en termes d’efficacité, mais la recherche au sujet de ces interventions révèle des limites, notamment lorsque mise en relation avec le choix de carrière.

Il n’existe pas de programme qui répond spécifiquement à l’anxiété en situation de choix de carrière. Ces constatations m’ont mené au développement d’une intervention en counseling de carrière groupal dans une perspective culturelle-historique.

Audrey Dupuis, doctorante en éducation

L’analyse a également permis de mettre en lumière les besoins d’orientation pour réaliser les choix de cours durant le quatrième secondaire pour lesquels les personnes adolescentes ont eu, dans les milieux étudiés, peu de soutien. Audrey Dupuis souligne qu’il devient très important de s'interroger sur la priorisation actuelle des services d’orientation devant ces besoins et les sources de l’anxiété au regard du choix de carrière. 

Implantation d’un programme novateur en counseling de groupe

La doctorante, qui a reçu une mention facultaire pour l’excellence de sa thèse, a développé une proposition originale sur l’importance de l’activité du groupe et des liens émotifs qu’elle suscite. Ainsi, cela peut soutenir l’apprentissage et le développement des personnes en lien avec la maitrise de l’anxiété et du choix de carrière.

Sous la direction de la professeure Patricia Dionne du Département d’orientation professionnelle et la codirection du professeur Frédéric Saussez du Département de pédagogie, Audrey Dupuis a pu implanter un programme auprès de trois groupes de 6 ou 7 personnes participantes. Les données qualitatives ont fait l’objet d’une analyse thématique et d’un découpage hebdomadaire pour déconstruire, puis reconstruire à rebours le développement des capacités des personnes participantes à maîtriser leur anxiété et à réaliser un choix de carrière.

En croisant l’ensemble des données recueillies (enregistrements vidéos, journaux de bord, entretiens de suivis avec les personnes participantes), il est possible de recréer à rebours les processus d’apprentissage et de développement des personnes participantes du début de leur participation au groupe jusqu’à trois mois suivant la fin des rencontres. Il est donc possible de suivre le cheminement des participantes de façon assez précise.

Audrey Dupuis, doctorante en éducation

Audrey Dupuis nous donne l’exemple d'une participante qui a commencé le groupe avec une crainte importante de faire un « mauvais choix » et de devoir changer de programme de formation après un certain temps. Au cours des rencontres du groupe, plusieurs discussions et instruments transmis lui ont permis de réfléchir autrement à la situation et de réaliser des prises de conscience.

À la fin du programme, elle indique être prête à essayer un programme et est ouverte à la possibilité de changer si elle se rend compte qu’elle n’aime pas cela. Sa participation au groupe semble donc lui avoir permis d’être plus souple à l’égard de son choix de carrière et lors des entretiens de suivi, elle explique que de voir les autres participantes être plus sereines par rapport à la perspective de changer d’idée lui a permis de développer ce nouvel état d’esprit.

Audrey Dupuis, doctorante en éducation

Ainsi, l’intervention groupale permet de créer un espace de discussion et de réflexion privilégié entre des personnes vivant de l’anxiété en situation de choix de carrière. Elles peuvent normaliser leur expérience, s’entraider et se soutenir pour identifier et utiliser des moyens pour reconnaître et agir sur leur anxiété et leurs enjeux relatifs au choix de carrière.

Volet Orientation au Programme HORS-PISTE

Durant l’élaboration du projet de thèse et du programme d’intervention visant la prévention et l’intervention sur l’anxiété en situation de choix de carrière, le Centre RBC d’expertise universitaire en santé mentale de l’Université de Sherbrooke a démontré son intérêt pour le programme. Ce centre est derrière le Programme HORS-PISTE, qui vise la prévention de l’anxiété chez les jeunes du préscolaire à la fin du secondaire. Il est actuellement implanté dans plus de 150 écoles du Québec et le travail se poursuit pour élargir sa portée.

Le volet Orientation, développé dans le cadre de la thèse, est maintenant intégré à l’offre de services du Programme HORS-PISTE en tant que programme d’intervention pouvant être offert par les personnes conseillères d’orientation pour les élèves du 2e cycle du secondaire. Ce programme d’intervention développé par l’autrice est maintenant implanté dans plusieurs écoles et centre de services scolaires du Québec et bientôt du Nouveau-Brunswick et de l’Ontario.

Avec le Programme HORS-PISTE Orientation, Audrey Dupuis offre une réponse scientifiquement appuyée et concrète pour agir sur l’augmentation des enjeux actuels liés à l’anxiété face au choix de carrière des jeunes du secondaire.

Professeure Patricia Dionne

Il sera éventuellement offert gratuitement à l’ensemble des personnes conseillères d’orientation qui souhaiteront l’implanter. Des demandes ont également été formulées pour l’offrir plus largement à des jeunes fréquentant d’autres milieux, dont la formation générale des adultes et la formation professionnelle, ainsi que pour la traduction en anglais du programme.