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Dans un esprit de fierté et d’humilité

Les membres de l’équipe médicale de l’UdeS partagent leur expérience en Haïti

À l'avant, la professeure et chirurgienne Anne Méziat-Burdin, l’infirmière Martine Duperval et le professeur Pierre-Michel Roy, lors de leur arrivée à l'aéroport de Dorval.
À l'avant, la professeure et chirurgienne Anne Méziat-Burdin, l’infirmière Martine Duperval et le professeur Pierre-Michel Roy, lors de leur arrivée à l'aéroport de Dorval.
Photo : Robert Dumont

Le professeur Vincent Echavé dirigeait la mission médicale de la Faculté de médecine et des sciences de la santé qui s’est rendue en Haïti du 19 janvier au 7 février. Professeur à la Faculté et chirurgien général et thoracique au CHUS, il travaille auprès de l’organisation Médecins sans frontières depuis 1990 et est déjà allé en mission en Haïti. Mais cette dernière mission a été particulièrement marquante, dans un pays parmi les plus pauvres de l’hémisphère.

Vincent Echavé a expliqué que le personnel médical et infirmier, installé à l’hôpital Albert-Schweitzer de Deschapelles, a reçu de nombreux patients souffrant de fractures, parfois multiples, souvent complexes. «Nos chirurgiens ont fait un travail magnifique, dit-il. Il était très important de pouvoir sauver beaucoup de patients; pas uniquement de les maintenir en vie, mais de garder leurs membres, et d’éviter les amputations. Dans un pays comme Haïti, c’est quelque chose qui a une très grande importance.»

En plus du professeur Echavé, directeur de mission, tous les membres de la délégation médicale ont partagé leurs observations lors de leur retour au bercail.

Le professeur François Cabana, chirurgien orthopédique au CHUS, et le professeur et anesthésiste Michel Clairoux.
Le professeur François Cabana, chirurgien orthopédique au CHUS, et le professeur et anesthésiste Michel Clairoux.
Photo : Robert Dumont

Michel Clairoux, professeur d’enseignement clinique à la Faculté et anesthésiste au CHUS, a parlé des souvenirs impérissables qu’il garde de cette mission et de l’attention portée au contact humain en vue de mieux comprendre le peuple haïtien. «Nous avons vécu une situation où un enfant n’allait vraiment pas, et on avait atteint la limite des possibilités médicales, raconte-t-il. Nous avons dû prêter attention à l’aspect spirituel, les Haïtiens étant des gens très croyants. Il restait la prière, et plusieurs membres du groupe se sont rendus à une église baptiste afin de prier pour cet enfant.»

Son collègue, François Cabana, professeur et chirurgien orthopédique, a ajouté que certains sont aussi allés voir un guérisseur vaudou. «Au delà de la catastrophe, j’ai eu le privilège de côtoyer une équipe fantastique», a-t-il dit. Il a expliqué comment chaque membre avait été dévoué et avait accepté de porter plusieurs chapeaux afin de soigner le plus de patients possible.

Stéphane Lavoie, professeur et infirmier, et Sylvie Bédard, infirmière au CHUS.
Stéphane Lavoie, professeur et infirmier, et Sylvie Bédard, infirmière au CHUS.
Photo : Robert Dumont

Stéphane Lavoie, professeur à l’École des sciences infirmières et infirmier spécialisé en traumatologie au CHUS, a pour sa part été marqué par les conditions dans lesquelles les malades devaient retourner à la maison après leur hospitalisation : «C’est toujours inquiétant de voir des patients quitter l’hôpital pour retourner dans une maison en partie démolie. Certains patients, soignés pour des fractures, devaient aussi parcourir 60 ou 70 km à dos d’âne pour rentrer chez eux, a-t-il illustré. Pour notre part, nous avons la chance d’avoir un soutien psychiatrique en revenant ici. Mais les personnes restées là-bas, les patients et les intervenants, sont encore là. Ces personnes ont aussi besoin de soutien.»

Un peu dans le même sens, Martine Duperval, infirmière auxiliaire au CHUS, a témoigné de plusieurs patients qui ont exprimé le privilège d’avoir pu être soignés loin de la capitale. «Certains ont fait des kilomètres en tape-tape ou sur des motocyclettes, sur des routes de montagne, malgré leurs fractures. Plusieurs ont quitté Port-au-Prince parce qu’on les dirigeait vers des camps pour se faire amputer. Un des patients nous a dit : "Si vous n’étiez pas là, nous non plus, on ne serait pas là".»

Née au Québec mais ayant des racines haïtiennes, Martine Duperval dit en avoir beaucoup appris sur sa propre culture. Elle s’était rendue disponible rapidement lorsqu’elle a su qu’une mission s’organisait.

Maître et élève

La résidente Élisabeth Leblanc retrouvant ses proches, dont son neveu, à l’aéroport.
La résidente Élisabeth Leblanc retrouvant ses proches, dont son neveu, à l’aéroport.
Photo : Robert Dumont

Élisabeth Leblanc, une résidente de troisième année en orthopédie, faisait aussi partie de la mission. Elle a expliqué que cette expérience a fourni une occasion extraordinaire d’apprentissage. «J’ai appris en trois semaines ce que j’apprends ici en trois mois, qu’il s’agisse du travail en salle d’opération, mais également des tâches dans l’hôpital.» La résidente a particulièrement apprécié la place que ses collègues lui ont faite dans l’équipe.

Le professeur Vincent Echavé, directeur de la mission.
Le professeur Vincent Echavé, directeur de la mission.
Photo : Robert Dumont

Le directeur de mission, Vincent Echavé, a d’ailleurs souligné qu’Élizabeth Leblanc avait agi envers lui comme un maître, et lui comme son élève, lors de certaines interventions en orthopédie, dont il n’est pas un spécialiste.

La professeure de chirurgie Anne Méziat-Burdin avait pour sa part de bons mots pour les chirurgiens haïtiens qui ont laissé leur bloc opératoire à la disponibilité de l’équipe sherbrookoise. «Ils se sont rabattus sur une petite salle très inconfortable parce qu’ils considéraient notre apport primordial. On ne serait probablement pas aussi aimables avec des collègues étrangers qui nous pousseraient de notre bloc opératoire», a dit la chirurgienne, décrite par le professeur Echavé comme l’étoile de l’équipe, et dont les soins constants ont permis de sauver la vie de plusieurs enfants.

Sylvie Bédard, infirmière au bloc opératoire et chef d’équipe au CHUS, a surtout travaillé au bloc opératoire. Elle a été frappée par l’élan de solidarité déployé en Haïti. «Il existe un réseau de personnes de tous les pays du monde qui veulent le bien des Haïtiens. On rencontre beaucoup de gens qui s’impliquent gratuitement. Ça a été un voyage riche de sentiments et aussi de belles rencontres. Une telle mission nous permet de donner, mais tout ce qu’on reçoit en retour représente beaucoup plus que ce que l’on a donné.»

Pierre-Michel Roy, professeur au Département de médecine de famille, a parlé du sentiment de fierté de l’équipe face à cette mission, mais surtout du devoir d’humilité face à l’ampleur de la catastrophe : «Nous avons fait de petites choses par rapport aux besoins à venir pour le peuple haïtien. Par exemple, à Port-au-Prince, on nous a rapporté trois cas de tétanos, ce qui pourrait être le signe avant-coureur de grands événements qui pourraient survenir et qui commanderont d’autres interventions, en matière de santé publique, pour prévenir des épidémies. En ce sens, notre contribution appelle un certain degré d’humilité.»

La Faculté de médecine et des sciences de la santé entend continuer d’agir pour Haïti. À lire dans cet autre texte.


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