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La véritable priorité...

Je suis né dans une famille de parents très aimants qui auraient tout sacrifié  pour leurs enfants. Ils ont le mérite de travailler avec acharnement pour arriver au niveau de vie dont ils font bénéficier toute leur petite famille. Devant des parents si dévoués, je me sentais incapable de les décevoir d’une quelconque façon. J’essayais donc autant que possible d’être à la hauteur de ce qu’ils percevaient de moi : un jeune homme brillant, très autonome et sans problème, dédié à un bel avenir comme ils me disaient souvent, le regard plein de fierté et d’admiration.

À part mes études, pour lesquelles je sentais le devoir d’exceller, je m’impliquais dans toutes sortes d’activités sportives et étudiantes, tant comme participant que comme organisateur. En plus de la considération de mes parents, je m’attirais celle de mes collègues et de mes supérieurs. Si tout paraissait brillant à l’extérieur, à l’intérieur de moi c’était la noirceur. J’étouffais et je n’osais en parler à personne. Quelle que soit l’activité dans laquelle je m’impliquais, je devais me démarquer. Je me sentais pris dans un engrenage sans possibilité de reculer. Comment m’en sortir sans décevoir personne? De plus en plus, il m’arrivait de penser à la mort pour échapper à toute cette pression, et est venu le jour où je n’ai plus été capable de supporter tout cela. Comme parler à quelqu’un me paraissait impossible, l’idée de mourir m’est apparue comme la seule issue possible.

Sur la route, lorsqu’un camion est arrivé à ma rencontre, j’ai braqué mon volant en sa direction. Contre toute attente, je m’en suis tiré miraculeusement. Le chauffeur, dans sa déposition, a formellement affirmé qu’il avait vu que mon geste était délibéré. On m’a offert de l’aide. Et je me suis finalement ouvert sur ce que je portais lourdement depuis des années.

J’ai réalisé que je mettais tellement en priorité les attentes des autres que j’en oubliais ma véritable priorité : vivre ma vie, selon mes choix, mes idées, mes rêves. Mes parents étaient fiers de moi. Ils le sont encore. Ils l’auraient été peu importe mes succès ou mes échecs. Il en va de même pour mes amis ou mes supérieurs. Ils m’apprécient de toute façon. Cette période difficile fait maintenant partie du passé. J’ai repris possession de ma vie et j’en jouis chaque jour.

Johanne Bernatchez, psychologue
Service de psychologie et d’orientation


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