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Louis Hamelin

Le goût de se raconter

Chargé de cours en littérature à l’UdeS depuis quelques années, Louis Hamelin est d’abord et avant tout écrivain. Au cours des trois dernières décennies, il a publié une dizaine de romans et plusieurs autres ouvrages qui lui ont valu plusieurs prix : prix du Gouverneur général en 1989 puis, en 2011, Prix littéraire des collégiens, Prix des libraires du Québec, Grand Prix littéraire de la Presse québécoise et Prix Ringuet.

Muses : Vous avez d’abord étudié la biologie. Comment vous est venue l’envie d’écrire?

Louis Hamelin : Je ne sais pas vraiment… Je dirais que cette envie a toujours été là. J’écrivais des trucs que je gardais dans des calepins. J’étais « bon en français », comme on dit. Mes collègues en bio me le faisaient parfois remarquer. C’est comme ça que je me suis mis à écrire dans quelques revues portant sur la nature.

Muses : La littérature est venue plus tard…

Louis Hamelin : Oui, ça a commencé à me travailler à la fin de la vingtaine. J’avais le goût de me raconter. Nos vies sont généralement plutôt chaotiques. L’idée de mettre des formes là-dedans me séduisait.

Muses: C’est alors que vous avez fait un retour aux études…

LH: Oui. J’étais biologiste, je n’avais aucune connaissance du milieu littéraire et je voulais écrire des romans. Je me suis inscrit à la maîtrise en création littéraire à l’UQAM. Comme je n’avais pas de formation littéraire, j’ai dû suivre quelques cours au bacc. avant de commencer ma maîtrise. C’est à cette période-là que j’ai écrit La Rage, mon premier roman. J’ai parlé de ce roman à un de mes professeurs, Maurice Poteet, un spécialiste de la littérature américaine. Ce prof-là a été très important pour moi. Il m’a comme pris sous son aile. Il m’a présenté à un de ses collègues, André Vanasse, qui était aussi directeur littéraire pour la maison d’édition Québec/Amérique. Il m’a d’abord dit qu’il trouvait que mon roman était trop compliqué et qu’il ne le publierait pas. Puis, quelques mois plus tard, il m’a recontacté. Il avait changé d’idée et m’offrait finalement de publier La Rage.

Muses : Premier roman qui vous a valu le prix du Gouverneur général… Ça ne doit pas arriver souvent qu’un jeune biologiste totalement inconnu dans le monde littéraire gagne le prix du Gouverneur général avec son premier roman.

LH : Je n’ai pas de statistique à ce sujet… J’étais en nomination avec Robert Lalonde et Jacques Poulin, deux écrivains de renom. Jamais je n’aurais pensé remporter ce prix. Ce fut toute une surprise mais, en même temps, ce prix-là a fini de me convaincre que j’étais un écrivain et que c’est ça que je ferais dans la vie. J’ai ensuite écrit Ces spectres agités, qui est le fruit de mes études de maîtrise en création, et je n’ai pas arrêté d’écrire depuis.

Muses : Comment écrivez-vous? Y a-t-il un endroit particulier? Des rituels? Écrivez-vous chaque jour?

LH : Les gens considèrent souvent les écrivains comme des individus très libres. C’est vrai qu’on n’a pas de patron et qu’on peut faire pas mal ce que l’on veut. Mais il n’en demeure pas moins qu’écrire un roman, c’est faire un effort quotidien pendant des mois. Pour ma part, je n’ai pas vraiment le choix d’avoir une routine.

J’ai un bureau dans lequel je me retire pour travailler. Je travaille la plupart du temps de jour. Je prends congé les fins de semaine et lors des journées pédagogiques de mon garçon mais j’écris presque chaque jour.

Muses : Toujours sur vos projets de roman?

LH : Petit à petit je suis devenu un touche-à-tout de l’écriture. Il faut dire que, à part de très rares exceptions, les écrivains doivent diversifier leurs activités pour survivre. Je suis chroniqueur littéraire au Devoir depuis une vingtaine d’années, j’ai collaboré à quelques scénarios, j’ai été écrivain en résidences à l’Université d’Ottawa et à McGill. Actuellement je travaille à la traduction française d’un roman canadien anglais. Et j’enseigne à l’Université de Sherbrooke.

Muses : Vous devez trouver que c’est un rôle qui se situe assez loin de celui de l’écrivain.

LH : C’est vrai qu’on est loin de la solitude de l’écrivain. Il faut être disponible, avoir envie de partager. Je donne des cours de création littéraire mais aussi des cours de littérature. Cet hiver, je vais donner un cours, Écriture et Lecture, qui explore ces deux versants d’une même montagne. Pour moi, il faut lire pour être écrivain. Alors j’essaie de transmettre l’envie de lire à mes étudiantes et étudiants.

Muses : Vous appréciez ce nouveau rôle d’enseignant?

Je ne saurais pas définir ce que ça m’apporte d’être mis en contact avec des jeunes de 22 ou 25 ans qui portent la même passion que j’avais à leur âge. Je ne suis pas en train de dire que cette passion s’est émoussée chez moi mais disons que, comme vieux pro, je suis plus difficile à impressionner. Alors c’est très agréable de voir des jeunes s’enflammer pour un texte ou un écrivain qu’ils découvrent. Et puis on a toujours l’espoir de découvrir le prochain grand écrivain!